Nada (qui veut dire"Rien" en espagnol) est le premier roman d'une romancière espagnole qu'elle publia en 1944 à l'âge de 23 ans et qui (selon l'éditeur de la traduction française) "marqua profondément toute la génération des écrivains ibériques de l'après-guerre. Il raconte une année de la vie d'une jeune fille de 18 ans, Andréa, orpheline de père et de mère, qui après la guerre civile (on doit être en 1939) revient vivre à Barcelone dans l'appartement familial située dans une maison du quartier autrefois huppé de de L'Eixemple, dans la rue Aribau très précisément, non loin de la place de l'Université, appartement occupée par sa grand-mère, une tante, deux oncles, la femme de l'un d'eux, une bonne et un chien. Elle s'inscrit à l'Université pour y suivre des études de lettres. La famille est désargentée et en viendra à vendre une bonne partie des meubles de famille.
Les premiers chapitres nous montrent Andréa peinant à se faire une place entre sa tante acariâtre et figée dans ses grands principes et ses oncles plutôt fantasques voire carrément craignos. Si la famille est pauvre, Andréa l'est encore davantage et elle est contrainte à réduire à l'extrême ses rations alimentaires en se contentant souvent des restes que sa grand-mère lui a laissés. Une fois sa tante Angustias partie de Barcelone, Andréa jouira d'une plus grande liberté et pourra élargir son cercle d'amis, au centre duquel se trouve Ena, son amie fidèle jusqu'au jour où les choses prendront une tournure qui laissera Andréa désemparée.
J'ai eu un peu de mal à entrer dans ce roman car, en dépit du choix du récit à la première personne, on apprend peu de choses de la narratrice. Ce qu'elle est, est en réalité devant elle. Les restrictions dues à la guerre, les difficultés du quotidien, les mesquineries des gens qu'elle côtoie sont particulièrement bien dépeintes bien que la situation politique de l'époque soit presque totalement absente du récit. Mais peu à peu le carcan étouffant qui entourait notre Cendrillon catalane se desserre et on est heureux de sentir la vie reprendre ses droits chez Andréa. La deuxième partie, où d'ailleurs la ville de Barcelone est plus présente (avec ses Ramblas, sa Cathédrale, son quartier chinois ... ) m'a davantage intéressée et l’écriture de la romancière s'y fait plus libre et plus complexe. J'ai finalement adoré suivre le long des boulevards ou des rues borgnes, sur les plages de Catalogne ou dans la sombre cage d'escalier de son immeuble, les pas de cette Cendrillon barcelonaise qui, plus qu'un hypothétique prince charmant, cherche avant tout à goûter et à savourer la liberté.
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