L’homme aux pistolets d’or.
La guerre américano-mexicaine (1846-1848) a beau être terminée depuis plus de vingt ans, Juan « Golden guns » Gonzales, ennemi juré des gringos semble avoir survécu alors même qu’il avait été supposé mort après sa capture, lui, ses deux plus jeunes frères et sa bande sanguinaire, fait prisonniers par les Texas rangers et tous décimés par l’armée américaine. Pourtant, les vétérans se font massacrer les uns derrière les autres et Kit Carson est sur la liste puisque jeune ranger, il a participé à la capture de Gonzales. Tex Willer et Kit Carson vont devoir remonter une piste particulièrement sanglante avec, en bout de course, l’homme aux pistolets d’or, porté par une haine inextinguible.
Le scénariste Pasquale Ruju a concentré l’essence du western en 49 pages avec une vengeance au long cours et un duel explosif à la clé. R. M. Guéra, dessinateur serbe talentueux déjà exceptionnel sur la série « Scalped » réalise une histoire puissante dans laquelle son graphisme expressif et sa mise en page superbe font merveille. La mise en couleur de Giulia Brusco n’est pas en reste et concourt à densifier le récit tout en le rendant encore plus lisible si besoin était. Malgré la qualité très élevée de la série des Tex cartonnés en couleur, le 9e volume hausse encore le niveau, réussissant la gageure de rivaliser avec des histoires habituellement bâties sur plusieurs centaines de planches.

Le vengeur.
Dans sa jeunesse, Tex Willer s’est fait hors-la-loi en vengeant la mort de son père mais Bronson, un puissant rancher, cornaquant la rapine de bétail du Texas vers le Mexique, met une prime sur la tête de Tex. Pour couronner le tout, Jim Callahan, un Texas ranger, est aussi sur la piste du jeune Willer. Tex n’a pas d’autre choix que de s’attaquer à Bronson, véritable nœud gordien dans sa vie chahutée. Pour ce faire, il devra franchir le Rio Grande et se mesurer à la trentaine de comancheros du féroce et sadique Benitez alliés à la douzaine de cow-boys du Lazy M, le ranch de Bronson.
Mauro Boselli n’a pas le temps d’installer les ambiances habituelles qu’il concocte dans les histoires habituelles courant sur plusieurs centaines de pages. Il doit concevoir son histoire en cinquante planches et resserrer l’action en conséquence. Entre les coups de tonnerre, de fouet et de feu, il y a peu de place pour la cogitation et l’échange amical, la lente montée d’adrénaline. Tex Willer apparaît encore plus que de coutume déterminé et implacable, endossant l’étoffe d’un super-héros sans autre pouvoir que son adresse au tir, sa force physique et sa résistance aux coups. Stefano Andreucci est un dessinateur exceptionnel et sa réalisation éblouissante laisse le lecteur pantois d’admiration. Seul bémol, la mise en couleur de Matteo Vattani, pourtant de grande qualité, recouvre un peu trop le graphisme ciselé du maître transalpin. A noter la parution la même année en 2017 du Tex Spécial n° 32 réalisé par le même duo d’artistes, soit 240 planches merveilleuses travaillées à la pointe fine par le grand Andreucci, éclatantes de force et irradiantes de beauté, dans le grand format en noir et blanc de la collection réservée aux dessinateurs les plus talentueux de l’écurie Bonelli.

Duel au Montana
Tex Willer chevauche dans les âpres Montagnes Rocheuses du Montana et se réfugie sous une cavité afin d’éviter la morsure du blizzard. La nuit, des coups de feu au loin l’alertent mais ce n’est qu’au petit matin qu’il peut reprendre la piste. Il découvre un campement de Blackfeet incendié et massacré. Le tomawak ramassé sur les lieux du crime oriente Tex vers son ancien ami Birdy. Il se dirige alors vers le trading post tenu par Birdy et sa femme Lily. Tex apprend que des chasseurs menés par l’intraitable Theodore Tirrell à la solde de l’American Fur Company ont décidé de pressurer les Indiens afin qu’ils fournissent davantage de peaux à bas prix. D’autres part, des guerriers Blackfeet veulent venger leurs morts et ils savent que Birdy a servi d’intermédiaire avec Tirrell.
Les éditions Bonelli ont lancé une nouvelle série autour de leur personnage vedette Tex Willer, Romanzi a fumetti. Si Serpieri a inauguré la série avec un album assez peu enthousiasmant, les albums suivants ont relevé le défi de se pencher avec brio sur la jeunesse de Tex. Gianfranco Manfredi est un scénariste phare de l’éditeur transalpin. Son histoire est pourtant très classique et sans grand rebondissement. En revanche, le dessin de Giulio De Vita est réussi. Un soin particulier a été accordé aux décors. Les Montagnes Rocheuses sont somptueuses sous la neige bleutée. Les couleurs de Matteo Vattani sont soignées et contribuent grandement à la réussite de l’album. Le lecteur habitué au ranger texan ne trouve pas tout à fait le même plaisir à survoler une cinquantaine de pages quand une histoire classique tourne autour de deux cents pages. De plus, l’éditeur italien maintient un coût relativement modique à des productions de grande qualité, fournissant avec brio une bédé populaire. Regarder du côté de l’album couleur formaté et d’une clientèle plus aisée revient à s’ouvrir à d’autres marchés mais à risquer de renier des principes méritoires et rarissimes aujourd’hui.