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Les notes de lectures recherchées

6 livres correspondent à cette oeuvre.

Il y a actuellement 2 notes de lecture correspondant à cette oeuvre (voir ci-dessous).

Notation moyenne de ce livre : (1 livre correspondant à cette oeuvre a été noté)

Mots-clés associés à cette oeuvre : incommunicabilite

Auteur    Message
apo



Sexe: Sexe: Masculin
Inscrit le: 23 Aoû 2007
Messages: 1954
Localisation: Ile-de-France

Posté: Mer 21 Avr 2021 9:13
MessageSujet du message:
Commentaires : 0 >>

Tous ceux qui ont un jour séjourné dans un pays dans lequel les langues qu'ils connaissent n'ont pas du tout cours, ceux qui au moins une nuit ont fait le cauchemar de se retrouver involontairement dans un lieu inconnu en situation d'incommunicabilité absolue, ceux dont la survie a dépendu de l'apprentissage en autodidacte de la langue complètement obscure d'un entourage relativement hostile, ceux qui, tout en ayant une formation de linguiste, ont fait l'expérience de l'inutilité de leur savoir et de la nullité de leurs compétences face à un nouvel idiome, nous tous découvrons en Budaï un proche, reconnaissons dans son récit quelques aspects d'un vécu et d'un ressenti communs.
On peut s'attarder sur au moins trois lectures de ce roman culte de la littérature hongroise, dont l'auteur est peut-être davantage connu dans son pays comme sportif de haut niveau et assurément davantage comme fils d'écrivain que comme écrivain lui-même. D'abord, on s'intéresse au personnage de Budaï, considérant l'équilibre très juste entre la description de son flux de conscience, de ses divagations de linguiste sans succès et d'homme en détresse, et la narration de ses péripéties. Parmi celles-ci comptent autant son étrange relation avec le personnage féminin dont le prénom toujours varié est éponyme du livre, que sa participation à une émeute, un soulèvement armé, peut-être une action révolutionnaire qui constitue le point culminant et terminal du roman.
Deuxièmement, on peut émettre des hypothèses sur la nature du régime politique de la métropole surpeuplée et chaotique dans laquelle Budaï est échu, sur les rapports sociaux qui y règnent, sur sa violence, ses distorsions communicatives et déficits démocratiques qui, à l'évidence, ne concernent pas uniquement l'étranger réduit au silence qu'il est. Métaphore d'un totalitarisme de l'anonymat et de l'anomie ?
Troisièmement, on peut dire un mot sur le style : je trouve là aussi qu'il y a un équilibre très habile entre l'humour venant de l'hyperbole – la situation cocasse de l'homme qui échoue sans cesse en se réduisant au plus bas, et dont le lecteur ne peut même pas se consoler en pensant qu'il aurait su agir de manière plus perspicace – et le tragique de cette même situation, dans la mesure où il est évident que chacune des péripéties du protagoniste est l'emblème de désolations caractéristiques de notre contemporanéité : ainsi de sa visite aux abattoirs industriels, au bordel, au parc d'attractions, de son ascension à la lanterne d'une basilique, ainsi que de sa descente aux enfers de la cellule de prison, aux halles – lieu de labeur et de refuge sans domicile, enfin sous le feu des armes dans un parking multi-étages assiégé. La mesure du temps se fait par l'érection des étages d'une gratte-ciel en construction ; le personnage féminin officie comme préposée à l'un des ascenseurs de l'hôtel...


Cit. :

1. « C'est en lui-même que doit résider la faute, dans son caractère auquel toute agressivité, toute bousculade sont étrangères, cette révélation vient de s'imposer à lui, tout endormi et ivre qu'il est. Tant qu'il n'arrivera pas à vaincre sa modestie pusillanime, sa crainte d'importuner, il n'arrivera jamais à partir d'ici, ni même à donner de ses nouvelles afin que quelqu'un puisse lui porter secours. Il doit livrer combat lui-même, il n'a pas d'autre issue. Il doit se transformer des pieds à la tête, c'est l'unique façon de recouvrer son ancienne, sa véritable vie, sa personnalité. » (pp. 84-85)

2. « Lui, déconcerté, la regarde impuissant : comment la consoler, il n'a pas la moindre idée de ce qui ne va pas, de ce qui la blesse, par qui elle a peut-être été insultée. Attention malgré tout, pense-t-il. Il ne doit pas s'occuper de telles futilités, il n'en a pas le temps, il doit rester de marbre, sans pitié et aller droit au but, c'est son unique chance. Il ne doit consacrer à cette fille que le minimum d'attention nécessaire pour préserver leur relation, tout le reste serait pur gaspillage de son énergie. Et si par hasard elle nourrit d'autres sentiments à son égard, il doit bel et bien en profiter pour en tirer avantage. » (p. 176)
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[Epépé | Ferenc Karinthy]
Auteur    Message
ingannmic



Sexe: Sexe: Féminin
Inscrit le: 22 Aoû 2008
Messages: 737
Localisation: Mérignac

Posté: Mar 27 Mai 2014 11:18
MessageSujet du message: [Epépé | Ferenc Karinthy]
Commentaires : 0 >>

Budaï ignore comment il a échoué là...
Parti pour la Finlande, où il devait participer, en tant que linguiste, à une conférence, il a atterri dans un pays dont -comble de l'horreur- il ne comprend pas la langue, un étrange charabia qui ne ressemble à rien de ce que cet érudit en la matière a pu étudier. Un car l'a conduit de l'aéroport à un hôtel, où son argent a été changé contre des devises locales. Les lieux semblent surpeuplés : chaque démarche -acheter de la nourriture, obtenir un renseignement auprès de la réception, prendre l’ascenseur- nécessite de patienter longuement dans d'interminables files d'attente. Les individus forment ici des multitudes anonymes dont les déplacements créent un incessant mouvement. Pourtant, Budaï ne pourrait être plus seul qu'au cœur de cette foule indifférente qui ne paraît même pas le remarquer, et avec laquelle il s'avère impossible de communiquer.
Il n'a qu'une idée en tête : quitter cet endroit pour regagner la Finlande avant la fin du colloque.
Mais la barrière de la langue et le manque d'intérêt que suscite chez ses interlocuteurs ses efforts pour se faire comprendre semblent le condamner à chercher une solution par lui-même.

L'absence de fantaisie, d'originalité, et la pauvreté apparente des échanges entre les êtres, contribuent à doter l'univers décrit par l'auteur d'une atmosphère anxiogène, grisâtre, et donnent le sentiment que Budaï évolue dans un cauchemar, perdu dans un environnement déshumanisé.
Et il arrive un moment où le héros lui-même semble prêt à se laisser contaminer par le curieux mélange de frénésie et d'insensibilité qu'arborent les citoyens de ce monde, comme si le rythme et les règles auxquels est soumis le fonctionnement de cette étrange cité avaient fini par l'imprégner.

Ce texte, écrit en 1970, est-il, ainsi qu'il a souvent été écrit, une métaphore visant à stigmatiser la rigidité et l'aliénation des systèmes totalitaires ?

A moins que Ferenc Karinthy n'ait été un visionnaire qui, à l'aube de la mondialisation, n'en ait pressenti les dangers, notamment celui de l'uniformisation croissante de nos sociétés, d'où seraient progressivement gommées toute particularité individuelle. Dans les rues de l'étrange cité imaginée par l'auteur hongrois, Budaï croise des hommes et des femmes qui évoquent de multiples origines (certains sont noirs, d'autres ont le type asiatique, arabe ou scandinave, sans qu'il soit possible de déterminer une quelconque majorité ethnique), mais qui curieusement se ressemblent tous. La plupart portent d'ailleurs des tenues similaires, et surtout, leurs comportements et leurs réactions sont étrangement identiques. Les aliments eux-mêmes révèlent un goût unique, écœurant et sucré...

"Epépé" est considéré comme un roman culte, sans doute en raison de l'originalité de son synopsis, et des questions qu'il est susceptible de susciter chez le lecteur. Personnellement, je n'ai pas accroché à ce récit, qui souffre de longueurs et de redondances, puisqu'il dépeint dans sa majeure partie les efforts vains et répétés du personnage principal pour sortir de cette ville... et de ce cauchemar. La fin, loin de nous éclairer sur une quelconque issue ou explication, est elle-même plutôt décevante.
Je suis donc passée à côté des qualités de ce texte dont j'attendais beaucoup. Peut-être trop...

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