C'est avant tout un livre d'ambiance. Le héros est un flic intègre de la police royale thaïlandaise. Il assiste impuissant à la mort de son coéquipier et frère de coeur et se jure de trouver le meurtrier et de le tuer pour laver le crime.
Comme la victime est un militaire américain, notre flic ne tarde pas à être assisté par un agent du FBI.
Ce qui fait l'intérêt du livre c'est ce portrait de la Thaïlande vu de l'intérieur et le contraste entre la perception qu'en ont les thaïs et celle des occidentaux, omniprésents à Bangkok.
Il est aussi beaucoup question de prostitution et de la place de la femme dans la société thaïe.
Malheureusement, l'enquête policière n'est guère passionnante et l'auteur multiplie les confessions des protagonistes pour la faire avancer. En gros, le flic suppose, il interroge quelqu'un qui conforte ses suppositions et on passe ainsi au suivant.

Cela dit çà se lit sans ennui jusqu'aux 50 dernières pages où on a un peu fait le tour de la question et où on dirait que l'auteur ne sait plus trop comment clôturer son histoire.
Un bon roman donc, mais pas forcément envie d'en lire d'autres.

Ceux qui ont aimé le voyage en Chine avec les polars de Qiu Xiaolong à Shanghaï, peuvent prendre sans hésiter un ticket pour la Thaïlande avec Bangkok 8 de John Burdett.
Un polar intelligent écrit par un britannique, visiblement tombé amoureux du pays thaï : on plonge avec fascination dans l'enfer du district n° 8 du L.A. asiatique, Krung Thep, ses charmes, sa corruption et ses trafics de drogue, de sexe et de jade ...
Et c'est avec un humour plutôt finaud que J. Burdett décrit par le menu la vie thaï en général (du moins la vie à Bangkok) et celle de l'inspecteur Sonchaï en particulier, un métis bouddhiste (quelque part entre moine et flic) qui doit faire équipe avec une envoyée du FBI.
Le choc des cultures est mis en scène avec tout ce qu'il faut d'ironie et d'esprit pour faire de cette enquête un agréable voyage à la découverte des us et coutumes thaïs : cuisine, religion, corruption, prostitution, superstition, fascination et répulsion pour l'occident, ... du moins jusqu'à la seconde moitié du livre où l'horreur criminelle reprend ses droits (c'est quand même un polar et on est quand même à Bangkok !) avant un dénouement typiquement asiatique !

Quelques morceaux choisis de l'ironie futée de J. Burdett :

[...] La Thaïlande ne retire pas grand chose d'industries comme celles du vêtement. Les sociétés occidentales se réservent la part du lion. C'est pourquoi nous voyons dans l'industrie du sexe une façon de redistribuer la richesse mondiale de l'Occident vers l'Orient.
[...] L'Occidental fait généralement observer que le Thaï vit dans un paradis de dupes. Peut-être, mais le Thaï n'est-il pas fondé à rétorquer que l'Occidental s'est construit un enfer de dupes ?
[...] Nous sommes un peuple superstitieux pour lequel quelque chose d'aussi intime que le nom doit nécessairement posséder un pouvoir magique. X demande ce qu'il en est des noms occidentaux. Ils reflètent généralement le fait que les Occidentaux sont obsédés par l'argent, en ceci qu'ils rappellent le métier que faisait un de leurs ancêtres : Smith, Woodman, Baker, Meunier, etc. C'est donc l'argent qui compte pour eux, et pour nous c'est la magie ? On peut le dire ainsi, bien que ce soit peut-être trop simplifier.
[...] Quoique la Thaïlande soit une société bouddhiste et humaine soucieuse des droits de l'homme et de la dignité de ses citoyens, les pays riches doivent comprendre que nous n'avons pas toujours les ressources nécessaires pour faire appliquer la loi comme il le faudrait. C'est un luxe que seules peuvent s'offrir les nations qui se sont industrialisées les premières.