-"Demande à la poussière" est le récit des débuts laborieux d'un jeune écrivain dans le Los Angeles des années 30.
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... Bon d'accord, je recommence :
-"Demande à la poussière" est LE récit des débuts laborieux d'un jeune écrivain, et c'est accessoirement l'oeuvre d'un auteur qui inspira, entre autres, Charles Bukowski, Jack Kerouac ou Hubert Selby Jr. Voilà qui suscite un minimum de respect, non ?
-Et qu'a donc cet auteur de si extraordinaire ?
-Ca, c'est une question posée par quelqu'un qui ne l'a jamais lu ! Parce que s'il y a bien une évidence qui saute aux yeux, à la lecture de "Demande à la poussière", en dépit d'un style aux accents parfois populaires, voire familiers, c'est que John Fante est un grand écrivain...
L'alliance d'un ton faussement naïf, et d'une écriture en réalité travaillée, confèrent aux événements décrits par le narrateur un caractère épique, extraordinaire. Il m'a semblé que l'auteur aurait pu raconter n'importe quoi, mon plaisir à le lire serait resté le même.
Il serait donc injuste de ne voir dans ce roman qu'une histoire facile et truculente, car il est loin de n'être QUE cela.
Son personnage principal lui-même, Arturo Bandini, incarne parfaitement ces apparences trompeuses, qui apparaît de prime abord comme un jeune écervelé assez agaçant...
Débarqué de fraîche date à Los Angeles, il a quitté son Colorado natal et sa famille d'origine italienne pour tenter de matérialiser ses fantasmes de richesse et de gloire en devenant écrivain. Il doit vite faire face à la sordide réalité, celle des piaules insalubres, des bas-quartiers où survivent tant bien que mal les oubliés du rêve américain. Lui-même a du mal à joindre les deux bouts.
Arturo, pétri de contradictions, est d'une mauvaise foi parfois hilarante. Il se dit athée mais ne peut s'empêcher d'invoquer la sainte vierge à tout moment, se montre odieux avec celle dont il prétend être amoureux... mais il sait aussi faire preuve d'autodérision, et surprend le lecteur par ses accès de générosité, d'amour de l'humanité, et surtout par ses soudaines envolées poètiques.
Il est finalement touchant, Arturo, avec ses rêves de fortune, de filles pendues à son bras, de grosses voitures, et qui après une journée en costume préfère renfiler ses vieilles frusques puantes mais familières. Et ce n'est qu'un exemple - certes très parlant- de la dualité qui semble habiter le jeune écrivain : il proclame sa fierté d'être américain, son désir d'être riche, mais en même temps donne l'impression d'avoir sa place parmi les laissés pour compte de cette nation qui sait aussi se montrer chauvine et raciste.
Avec "Demande à poussière", John Fante, sous le couvert d'un humour qui confine parfois au burlesque, sublime l'existence sans gloire de ceux qui sont habituellement méprisés.
-Hum... d'autres questions ?
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