J'ai été réellement happée par cette écriture,
C'est impressionnant un tel rythme qui te balance d'un côté puis de l'autre, puis te coupe les phrases puis t'oblige à t'arrêter. A sentir l'importance du mot qui pourrait passer pour anodin au milieu d'une grande phrase, mais qui là, tout seul, entre deux virgules, entre deux points, prend tout son effet, prend le temps de venir te frapper l'oeil.
Plutôt une impression de légèreté, de souffle saccadé mais entraîné. Une sorte de battement des pieds lors d'un bon vieux crawl pour pouvoir avancer tout droit, sans trop se poser de questions.
Je sais pas, ce style m'a un peu fait penser à Woody Allen quand il part dans ses délires verbaux dans ses films. A enchaîner des tas de mots, d'expressions, à ne pas se donner le temps de réfléchir parce qu'il réfléchit trop, à se couper lui-même à se reprendre.
L'étouffement, pour moi, était plutôt dans le vide du sujet. Et la bouffée d'oxygène arrive quand il sort de son apnée à la piscine.
J'ai bien aimé ce type qui se laisse guider par un regard, par un mot, qui laisse venir les choses et les gens, qui accepte tous les bouleversements. Qui bouleverse sa vie pour un regard. C'est top Romantique. Et en même temps la réalité de l'abandon est bien là. En équilibre entre le non pensé et le trop pensant.
Franchement, une très bonne découverte.
Un extrait :
"Anne, elle, c'était plutôt silence, silence et compagnie. A peine une présence. Une ombre. Dans mon grand appartement, Anne glissait, passait d'une pièce à l'autre. Rangeait, dérangeait, n'en finissait pas de s'installer. N'avait pas commencé, au juste. Cherchait sa place, comme si je ne la lui laissais pas toute, la place. Je me tenais dans le salon, vers le coin droit du canapé, ne bougeais pas tandis qu'Anne glissait sans cesse. A croire qu'au bout de ces quinze jours, n'ayant toujours rien trouvé pour faire son trou dans mon appartement, Anne Lebedel allait me demander si ça ne me dérangeait pas, en définitive, qu'elle loue pas trop loin de chez moi un petit studio, pour garder son indépendance. Elle viendrait me voir, bien sûr, elle aurait même sa place, qu'elle trouverait mieux, dans ces conditions, au sein de mon appartement. Une niche, un petit coin, pas davantage. J'en étais
malade, qu'on puisse en arriver là au bout de quinze jours. Mais on n'en était pas arrivé là. Anne était simplement partie sans rien dire."
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