Polar contemplatif comme il y en a de plus en plus. J'entends par là que l'auteur prend bien son temps pour dérouler l'histoire, par exemple en dotant son flic d'un vice envahissant (alcool, drogue, jeu), d'une maladie grave, d'une vie conjugale complexe ou d'une passion cachée (ici, la poésie). Chen est donc un policier poète et il ponctue sa vie de poésie et citations édifiantes. Autre signe : le polar est le moyen, pas la fin : Ici, l'auteur utilise le polar comme medium pour parler de la Chine des années 90. Et c'est justement parce que l'enquête policière n'est qu'un prétexte que l'auteur délaye à ce point, parce que son sujet s'appréhende dans la durée.
La Chine des années 90, qui a décidé de passer à l'économie de marché mais sans pour autant renoncer à son idéologie politique envahissante, tel est le sujet du livre. Xiaolong décrit une société à plusieurs vitesses : les néo-capitalistes qui sont déjà passés à l'économie de marché, les conservateurs du régime, qui restent dans la ligne de Mao et sont menacés par les politiciens pragmatiques, lesquels ont compris qu'il fallait changer quelque chose mai en essayant de conserver quand même l'esprit socialiste, les fils des cadres du parti usant les privilèges de leur rang pour jouir de la société en toute impunité et enfin l'écrasante majorité du peuple qui subit en serrant les fesses et en pliant l'échine : entassés dans des logements exigus, traumatisés par la révolution culturelle, forcés d'accepter toutes les décisions arbitraires du Parti...pas la joie. Le portrait de la société chinoise dressé par Xiaolong est édifiant et même s'il a tout de la société féodale que le communisme ambitionnait de remplacer (les castes, les mariages politiques, les privilèges pour les gouvernants), il a aussi quelques bons côtés et on sent l'hésitation des personnages entre les bienfaits et méfaits du régime actuel et les bienfaits et méfaits d'un autre régime...
En conclusion, c'est un très bon roman mais je l'ai trouvé trop long et son intrigue policière un peu convenue (mais encore une fois, çà n'est pas le sujet).
On peut en cela rapprocher ce livre de Enfant 44 de Tom Rob Smith qui racontait une enquête policière dans l'URSS des années 50. Autre temps, autre pays, mais même paranoïa et même société paradoxale.

Comme pour"Visa pour Shanghai" j'ai trouvé intéressante les indications sur l'histoire de la Chine mais l'intrigue ne m'a pas passionnée.

Le camarade inspecteur principal Chen Cao est un brillant jeune policier de Shanghaï, poète à ses heures. Le voilà en charge d'une affaire délicate, celle du meurtre d'une belle jeune femme, retrouvée étranglée et nue dans un canal et qui s'avère être une "travailleuse modèle de la Nation", c'est-à-dire d'une moralité irréprochable. Or, de fil en aiguille, voilà qu'un enfant de cadre supérieur (du Parti) est impliqué dans cette affaire de mœurs... Chen se trouve coincé entre sa morale de flic consciencieux et son rôle au sein du Parti...

Un très bon polar, au rythme nonchalant (il y a un monde entre les enquêtes speedées à l'américaine et celle des Chinois, qui ne disposent pas des mêmes moyens - en plus, l'affaire se déroule en 1990) qui m'a appris plein de choses sur la Chine et son régime. J'ai bien aimé le personnage de Chen Cao, tiraillé entre le devoir et la loyauté, et surtout poète et gastronome à ses heures. Ce roman se lit très bien, j'ai passé un très bon moment en sa compagnie, très dépaysante!

Voyage en Chine avec les polars de Qiu Xiaolong.
Un régal (et d'ailleurs on y parle beaucoup de cuisine !) avec moult détails savoureux sur la vie à Shanghaï sous Den Xiaoping : cuisine et gastronomie donc, crise du logement, difficultés de transports, corruption, politique et omni-présence du Parti, bouleversements de la Chine moderne, ... tout cela vient enrichir de manière pittoresque les enquêtes policières de l'inspecteur Chen Cao.
Pour commencer la série : Mort d'une héroïne rouge puis Visa pour Shanghaï, sortis en poche chez Point-Seuil (les plus récents sont chez Liana Levi).

J'ai fait un voyage en Chine. Avec l'Inspecteur Principal Chen, un fonctionnaire de police bien vu du "Parti". Au début, j'étais paumée dans cette Chine aux moeurs, coutumes et façon de penser politique étranges, une vrai touriste, quoi, qui ne retrouvait pas les habituels clichés sur la Chine, appris très jeune dans le "Lotus bleu". Mais petit à petit Chen m'a amenée doucement à me sentir à l'aise entre raviolis frits, poésie et enquête policière bien tordue grâce au "Parti" dans un Shangaï aux visages multiples, aux logements minuscules et aux rues embouteillées. On a même été se promener à Canton où je ne me suis pas étonnée de manger du chien dans des restaurants chics ! Bref un beau voyage en Chine. Et l'enquête ? Résolue après maints ennuis politiques mais pour mon plus grand plaisir.

Commençons tout de suite par les aspects négatifs (en fait le seul vrai aspect négatif que je lui trouve):
j'ai eu du mal avec l'écriture : plutôt lourde, un peu trop "répétitive", parfois trop précise, si j'ose dire, mais c'est peut-être par comparaison avec les livres lus avant ou en parallèle...
et pour le reste, j'ai vraiment apprécié l'intrigue qui se met en place tranquillement mais sûrement, les personnages et leurs états d'âme (avec mention spéciale pour le poétique Chen), et puis tout le contexte historique, que j'ai trouvé très bien amené, intégré comme il faut l'air de rien dans l'histoire, mais finalement très révélateur de la situation socio-politique de la Chine-post tienanmen... bref un livre bien cohérent, intéressant et prenant, plein de choses en [an], mais certainement pas chi[an] :-)

Enquête sur le crime d'une Travailleuse modèle, en Chine dans les années 90, sur fond de Maoisme encore omniprésent, où le "Parti" règne sur tout et tous...

Est-ce le rythme de cette écriture qui m'a déroutée ? Ou simplement le rythme de l'enquête ? Toujours est-il que j'ai eu l'impression de mettre énormément de temps à lire ce livre, pourtant pas si volumineux que cela (502 pages). Je n'avançais pas, ou si lentement...

Et ce Parti omniscient, qui menace chaque fait et geste, est une frustration constante dans le déroulement de l'enquête...

Quelqu'un d'autre pour infirmer ou confirmer mes impressions ? :/