L'arbre d'ébène est un premier roman généreux et exempt de tout narcissisme qui comporte plusieurs niveaux de lecture :
C'est d'abord un émouvant récit qui s'attaque au réel avec force et sans misérabilisme en décrivant la dure vie des sans-papiers par la voix de Nasser, un jeune enfant malien entré clandestinement en France avec sa mère.
Et, plus largement, une réflexion sur l'émancipation qui, au-delà d'un héros s'affranchissant d'une mère lui ayant donné « la vie mais aussi la peur et la mort », indique le chemin pour affronter le monde et devenir adulte : celui de la compassion qui permet de « ressentir les autres comme soi-même ».
C'est aussi , au travers de ce Candide noir, de cet enfant innocent brutalement arraché à l'Eden par l'enfer d'une traversée sur un « cayuco », le récit d'une libération et d'un enracinement dans le monde par la littérature. Car c'est la rencontre avec le livre d'un Blanc parlant « de lui, des autres et du destin » qui y délivre le jeune Nasser de ses fantômes et lui montre la voie : écrire pour exprimer pleinement son amour pour sa mère, même au-delà de la mort.
C'est enfin un magnifique hommage rendu à un écrivain qui a revêtu pour l'auteure une importance capitale . Fadéla Hebbadj se réfère explicitement à La vie devant soi d'Emile Ajar et à La promesse de l'aube, le roman autobiographique de Romain Gary célébrant l'amour maternel. Et l'ombre du grand écrivain disparu couvre le roman tout entier.
Sur mon blog L'or des livres, je développe précisément ce dernier point dans l'analyse que j'ai consacré à ce roman et Fadéla Hebbadj s'en explique dans l'interview qu'elle a bien voulu m'accorder en avril 2009 :
Difficile de donner mon avis sur ce livre ... je m'étais précipitée pour l'acheter, après en avoir lu de très bonnes critiques. Peut être je l'ai lu trop vite. Bref, un peu déçue avec un sentiment de ne pas tout avoir bien saisi. Je vous laisse juges !