L'enfance sous la dictature, le déménagement en occident, une vie qui se raconte par le biais de la BD et ensuite du dessin animé. Les épisodes des premiers volumes se déplacent, donc, entre deux mondes. Aux évènements extérieurs, gigantesques et tragiques, font contrepoids la légèreté et la poésie des faits quotidiens. On pense à Persepolis en s'approchant de Marzi, c’est-à-dire la Pologne des années nonante vue avec les yeux d'un enfant: Solidarność, l'état de siège, la saveur d'une orange, la tristesse pour l'éloignement d'une amie, les litiges, une chanson, un vêtement, les queues pour le pain. La visite de Jean-Paul ll à ses compatriotes, à parodier avec les petites amies de l’immeuble: son escalier devient l'escalier de l'avion, et Marzi vêtue de blanc imite le pape adoré par ses fidèles.
Et ensuite Chernobyl, les vacances à la campagne et cette carpe qui à Noël, dans chaque maison, reste des jours en liberté dans la baignoire, avant d’être tué et mangé : « peut-être que je devrais lui tenir compagnie », pense la petite Marzi, à l’époque Marzena Sowa, scénariste et protagoniste de l’album, qui, en 2001, déménage de la Pologne en France pour terminer ses études de lettres modernes.
Un an après se produit la rencontre avec le dessinateur Sylvain Savoia. « Moi je lui parle de mon passé, lui il fait des croquis », raconte Marzena, jusqu’à ce qu’en 2004 apparaît les premières histoires en couleurs pour l’hebdomadaire Spirou.
« Quelque soit le contexte économique, politique et social - écrit Sylvain Savoia - il y a un caractère universel dans cette période de la vie dont nous sentons terriblement le manque, lorsque nous devenons grands ». Un esprit bien rendu par le trait du dessinateur français, en suspens entre BD et manga japonais.
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