Une réflexion fort intéressante sur le danger dans nos sociétés d'une vision trop stricte et trop simpliste de ce qu'est l'identité. Ainsi, un musulman français issu de l'immigration est-il avant tout un français, un musulman ou issu de l'immigration? Et pourquoi ne pourrait-il pas être les trois à la fois? Les exemples sont évidemment multiples, sans doute aussi nombreux qu'il y a d'êtres humains sur terre, car tout un chacun peut être tiraillé à un moment ou à un autre entre son identité complexe et multiple et l'idée simplifiée que la société lui renvoie de cette identité (limité à un seul aspect ou mettant en avant un de ces aspects), bien souvent pour stigmatiser cette identité "tronquée".
L'auteur présente quelques exemples des conséquences d'une telle approche : guerre, insécurité, sentiment d'injustice, mais aussi rejet de la mondialisation, perte de culture, ... Ces exemples sont souvent centrés sur la religion, mais sont transposables, je pense, à toutes les facettes d'une identité.
Ce n'est pas que j'apprenne des tonnes de choses dans ce livre, mais de le voir écrit, c'est bien agréable, ça met en forme des idées passagères, ou des idées creusées, mises sur le papier et en perspective, c'est apaisant et confortant.
Tout cela reste par contre à mon goût pas assez creusé, voire même survolé ; c'est ce que souhaitait l'auteur : proposer une première réflexion sur le sujet et il répète d'ailleurs bien souvent que tel ou tel sujet demanderait plusieurs pages ou un livre à part entière pour creuser la question, je le regrette un peu.
ça reste un livre qui devrait être ajouté à la liste des manuels scolaires, à la matière "éducation civique".

Un monument de sagesse et d'humanisme. Selon Amin Maalouf, chrétien de langue arabe vivant en France, notre identité n'est pas faite d'une seule facette (nationale, linguistique, religieuse, culturelle, sexuelle, classe sociale, professionnelle...) mais d'une multitude de facettes qui fait que chaque être est à la fois semblable à des millions de personnes de différents pays, religions, cultures quand on fait l'union de ces facettes, et à la fois unique quand on en fait l'intersection. Alors pourquoi se replier soi-même ou être identifié par les autres sur une seule de ces appartenances jugée comme prédominante ? De plus, une même appartenance peut être différente suivant le contexte dans lequel on vit et qui peut évoluer (par exemple, un homosexuel ne vit pas cette facette de son identité dans un pays ou un autre).
Amin Maalouf explique aussi comment peut se créer un rejet mutuel quand un homme migre dans un pays mais n'arrive pas à s'intégrer, c'est à dire trouver suffisamment d'appartenances communes avec ses habitants, risque d'affirmer sa différence identitaire de façon plus radicale. L'auteur résumé ceci dans deux phrases indissociables :
"Plus vous vous imprégnerez de la culture du pays d'accueil, plus vous pourrez l'imprégner de la vôtre" et "Plus un immigré sentira sa culture d'origine respectée, plus il s'ouvrira à la culture de son pays d'accueil".
Intéressante idée aussi que la religion modèle la société à son image autant que le contraire : les religions évoluent, en bien ou en mal, par rapport à l'évolution des peuples, et parfois un pays d'une certaine religion où se passent des évènements dramatiques est catalogué vis à vis de cette religion alors qu'elle n'en est pas toujours la cause racine.

J'ai beaucoup aimé ce livre. Amin Maalouf m'apparait comme un grand humaniste. Lu, il y a déjà quelques temps, je ne peux en faire un résumé. D'ailleurs, il ne faut pas en faire un résumé mais le lire. Absolument !