Exutoire.
D'Ogremont poursuit son stage de pleine nature où jeûne rime avec dépouillement. Des rapprochements avec d'autres stagiaires s'opèrent car la remontée des peurs enfouies est douloureuse. La mise à nu permet de se voir sans fard mais la lucidité a un prix.
Le livre 2 de Détox poursuit sans rupture sur la lancée du premier tome. Matthias d'Ogremont expose ses lézardes derrière sa carrure de catcheur et gagne en profondeur. L'empathie du lecteur va de pair avec l'humanité dévoilée de Matthias. On peut toutefois trouver que les niaiseries s'accumulent notamment là où elles ne devraient pas être comme dans les feuillets du cancéreux en phase terminale sur lesquels des pensées sentencieuses et vaines pourraient composer le grand livre de la vie. C'est peine perdue et ça fait mal mais le scénariste espiègle déconstruit les postures et il accorde aux feuilles volantes une sortie inédite digne des plus belles feuilles de chou. Jim sait se saisir de l'air du temps pour le faire vibrer avec l'ironie du sort.

Retranchement.
La cinquantaine rugissante, Matthias d'Ogremont est un entrepreneur dévoré par son travail. Un décès soudain dans son proche entourage produit un électrochoc. Au pied levé, il s'impose dans un stage de détox à son corps défendant, la purge au romarin s'avérant radicale. Le Parisien au vert se confronte aux dures lois physiques de la terre. Une nuit à dormir à même le sol et les vertèbres se réveillent dans la douleur, terrassant le bonhomme sous l'œil impavide des biquettes.
Une énième version de l'urbain aux champs, ici un citadin plongé dans un séjour en pleine nature, permet de créer un décalage et de s'amuser aux dépens d'un gugusse qui ailleurs, dans son élément, pourrait se la péter avec son statut social élevé et sa maîtrise des codes mais qui perd ses repères une fois immergé dans la cambrousse et produit à tire-larigot un comique de situation et de répétition.
Jim, scénariste et portraitiste avisé, a bien croqué la bête et son époque carnassière. À une vie égoïste et jouissive qu'un boulot prenant de prédateur économique galvanise, la plongée en apnée dans un stage de ressourcement met en lumière tout un lot de profiteurs du mal-être contemporain, fliqueurs et intrusifs, jargonnant des banalités fumeuses. Entre les deux mondes, le rétif Matthias fait de la résistance et tout en s'intéressant aux autres avec empathie, commence aussi à s'ouvrir à lui-même. L'introduction avec le rappel d'un souvenir d'enfance traumatisant instille un petit suspense qui court tout au long du premier tome. Antonin Gallo a soigné les décors et la mise au gris quand Jim assure les dessins des personnages. Le duo d'auteurs fonctionne plutôt bien. Le livre 2 clôt le diptyque. Toutes les histoires sont bonnes à raconter quand le talent est là et Jim fait le job et la différence.