3 livres correspondent à cette oeuvre.
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Franz
Sexe: Inscrit le: 01 Déc 2006 Messages: 1996 Localisation: Nîmes
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Posté: Jeu 17 Oct 2024 17:45
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La débandade.
L'entre-deux-guerres, quand la France est prise dans les mâchoires des deux cataclysmes mondiaux, est la période mouvementée où s'agitent "Les enfants du désastre", maltraités et ruinés par les évènements familiaux et sociétaux. Pierre Lemaître entame chaque volet de sa trilogie par un coup d'éclat : la dernière attaque des tranchées dans "Au revoir là-haut", le saut de l'ange du petit Paul lors des obsèques de son grand-père dans "Couleurs de l'incendie", la fuite hallucinée de Louise Belmont dans les rues de Paris pour le dernier volume "Miroir de nos peines". Ces moments épiques signent le drame qui frappe des jeunes personnes, les enfants du désastre. le troisième volet de la trilogie ne déroge pas à la règle même si l'impact est ici davantage révélateur que destructeur. Louise accepte de s'exposer nue dans une chambre d'hôtel pour une grosse somme d'argent. le vieil homme paie et regarde la beauté incarnée qu'est Louise puis tout dérape. Louise a maintenant trente ans. Toute jeune fille âgée de dix ans, elle s'est liée d'une amitié absolue avec Édouard Péricourt, gueule cassée de la Grande guerre. Elle est sortie des radars quand Madeleine Péricourt, la soeur d'Édouard, a superbement occupé le devant de la scène dans le deuxième opus. Les années ont filé. Revoilà Louise et la débâcle de 1940, la sienne et celle de la France, d'un même accord dans la démesure. Poussée sur la route de l'exode comme une multitude de personnes, accompagnée par Jules, le tenancier de la Belle Époque, elle va atteindre un épicentre sous le toit troué de la chapelle Berault où des destins fracassés semblent converger.
Le roman n'a pas la même poigne que les deux précédents, du moins dès l'entame. Il se construit dans une sorte de cacophonie où plusieurs personnages en parallèle mettent en place leur histoire : Gabriel et Raoul Landrade dans la forteresse de Mayenberg, sur la ligne Maginot, Louise Belmont, institutrice et serveuse à Paris, le gendarme Fernand et Alice, sa femme au coeur chancelant et l'inénarrable Désiré Migault, parfait mythomane et grande âme. Bien d'autres protagonistes s'insèrent dans la spirale de la Débâcle. Quand le mouvement de l'Exode s'enclenche, l'intérêt du lecteur grandit en se fixant sur l'échappée ralentie par les embouteillages monstres et les inévitables avanies. Les épisodes s'enchaînent et prennent un tour dantesque quand l'improvisation devient reine dans le chaos en marche. L'évacuation de la prison du Cherche-Midi à Paris constitue un grand moment ubuesque. le style alerte de Pierre Lemaitre, l'habile construction narrative, la solide documentation redonnent vie à toute une époque dans laquelle il est possible de plonger avec un grand plaisir.
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Auteur |
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Message |
Franz
Sexe: Inscrit le: 01 Déc 2006 Messages: 1996 Localisation: Nîmes
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Posté: Mar 29 Aoû 2023 16:00
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Les filiations impossibles.
Albert Maillard, comptable dans le civil et Edouard Péricourt, en délicatesse avec un père fortuné sont poilus et pouilleux dans la même tranchée sous les ordres du lieutenant d’Aulnay-Pradelle, va-t-en-guerre impénitent, nobliau sans le sou assoiffé de reconnaissance et de pouvoir. Sans aucun scrupule, Pradelle est prêt à envoyer les soldats au casse-pipe si cela peut le servir mais les relents d’Armistice qui s’épandent peu à peu dans les consciences anesthésiées ne sont pas propices à l’élévation du lieutenant pour fait d’arme et bravoure au combat. A quelques jours d’une paix inespérée depuis quatre années d’enfer dans les tranchées, Pradelle doit agir, trouver le moyen de briller quel que soit le prix à payer. Edouard et Albert sont en première ligne et l’horreur va s’imposer au-delà du supportable. La cote 113 à reprendre aux Allemands restera coincée au creux des estomacs.
A la démobilisation, la société civile voudrait tourner la page et oublier les survivants sacrifiés en vain, devenant des laissés-pour-compte, la jeunesse calcinée et la vie brisée. Monter des magouilles, échafauder des escroqueries d’ampleur s’imposent pour survivre dans un monde égoïste, ingrat et aveugle.
Le succès d’« Au revoir là-haut » (2013) est incontestable. Le roman-fresque a été multi-récompensé, traduit et vendu en masse, adapté en bande dessinée dans la foulée par Christian De Metter (2015) puis au cinéma (2017) par Albert Dupontel. L’écriture cinématographique et le regard porté à hauteur d’homme peuvent expliquer en partie l’attrait immédiat exercé par le livre de Pierre Lemaître. Même sans grande imagination, le lecteur visualise séance tenante tout ce que narre l’écrivain : la trouille au ventre, la montée d’adrénaline, la fureur aveugle des hommes courant à la boucherie, les trous d’obus, la glaise, les cadavres, l’odeur pestilentielle et pendant que le film défile, on sent l’intrigue se nouer et se resserrer puis le destin des hommes porté par une vision. Lemaître sait où il va et cela se sent tout de suite et puis il y a une distanciation qui naît de l’omniscience du narrateur. On est prévenu de ce qui va advenir et cela arrive comme prévu mais une pirouette change la donne et fournit par contrecoup toute la charge émotionnelle qui va continuer à déflagrer tout au long de l’histoire. Enfin, pour faire une grande œuvre, il faut inventer un vrai méchant. Il est présent dès le début et il porte la beauté du diable.
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Franz
Sexe: Inscrit le: 01 Déc 2006 Messages: 1996 Localisation: Nîmes
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Posté: Mar 29 Aoû 2023 15:53
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Péricourt en la demeure.
Tel le grand argentier d'un haut seigneur, Pierre Lemaître dispose les meubles et les atours dans la résidence royale que constitue son roman avec une connaissance préalable du canevas d'ensemble. Il pose ses pièces, habille ses personnages, les dévêt à l'occasion et chaque action en entraînant une autre, dans une dynamique feuilletonesque, ourdit une machination bien huilée avec des jalousies, des ambitions, des conspirations, des vengeances et des retournements de situations dignes des romans de cape et d'épée d'Alexandre Dumas père.
Le riche et influent banquier Marcel Péricourt est mort. Ses obsèques nationales protocolaires déraillent rapidement. Tout était pourtant bien parti mais la théorie du chaos trouve à s'y exprimer pleinement dans des relations de causes à effets débridées. Sous le paraître, l'être gît souvent assez misérablement et il suffit que les circonstances s'y prêtent pour que la vérité affleure et si elle fait parfois sourire sous la plume chatouilleuse du talentueux romancier, elle n'est pas bien belle à voir. Quand vient la lecture du testament de Péricourt et la répartition de l'héritage, le lecteur peut se souvenir de la phrase De Balzac dans "Le colonel Chabert" : "Nos études sont des égouts qu'on ne peut pas curer".
"Couleurs de l’incendie", le second volume de la trilogie "Les enfants du désastre" ne déçoit pas après un premier tome particulièrement réussi. Les caractères sont dessinés à l'eau-forte et tous les protagonistes, en première place comme de second plan ont droit à un portrait fouillé. Ils semblent s'incarner en s'exposant ainsi. le lecteur ne peut qu'être embarqué dans la locomotive romanesque et jubiler malgré la tragi-comédie en marche.
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