Fausse alarme.
Recueilli blessé et commotionné après sa chute vertigineuse par Kende, un ancien leader de la tribu, marginalisé depuis la prise de pouvoir despotique par Thonga, Tex Willer reprend ses esprits, ses forces et ourdit un plan pour délivrer Kit Carson aux mains des dangereux Noirs eux-mêmes cornaqués par une bande de Mexicains avec qui ils rapinent les convois passant à proximité des Monts Chisos. Avec l’aide précieuse de Kende, un faux message est envoyé, tambour battant, à Thonga afin de l’attirer hors de son repaire. Pendant ce laps de temps, Tex et Kende vont pouvoir s’approcher du village et tenter de redonner courage à une majeure partie de la population tyrannisée.
Tout en gardant une apparence vraisemblable, le scénario de Claudio Nizzi fonce à bride abattue afin d’apporter une conclusion plausible mais attendue. Toutefois, quelques surprises émaillent l’aventure à l’exemple de l’attitude de Thonga face à l’adversité. Raffaele Carlo Marcello (1929-2007), de son trait souple et précis, orfèvre en la matière, séduit totalement. Artisan talentueux, Marcello a dû fournir bien des planches alimentaires avec une constance dans la qualité de sa prestation mais n’a jamais pu vraiment développer une œuvre personnelle à l’instar de la plupart des créateurs du 9e art.

Thonga le tyran.
Face à la résistance meurtrière des deux rangers, Chaska demande, par tam-tam interposé, l’aide de Thonga, despote sanguinaire et de ses affidés totalement assujettis. L’attaque fait rage. Kit et Tex étouffent sous le nombre des assaillants armés de lances et de fusils. Alors que Carson est fait prisonnier, Tex Willer, touché par une flèche tombe dans le torrent, au fond du canyon.
Claudio Nizzi développe son récit en le centrant sur la confrontation des rangers et des Noirs dont les motivations et l’histoire se précisent à mesure que les péripéties s’enchaînent. Carlo Marcello semble se délecter à croquer les trognes des Noirs et des Mexicains, caricatures grimaçantes et grinçantes d’un théâtre sanglant.

Les diables Noirs.
Alors que les deux inséparables rangers chevauchent dans le désert texan, Kit Carson en vient à se plaindre auprès de Tex Willer de ne faire aucune rencontre. Une cabane délabrée et le squelette du chercheur d’or dans lequel les crotales s’abritent viennent ponctuer l’avancée des deux compagnons. Tex remarque que l’homme a été tué dans le dos avec une pique acérée et Kit découvre une bible dans laquelle est écrit en lettres de sang le nom des assassins, « Les diables noirs » et le lieu où ils se situent, en plein désert, dans les monts Chisos. Désireux de retrouver les tueurs du prospecteur, les rangers atteignent la caldeira et le monolithe dont l’ombre pointe, telle l’aiguille d’une horloge céleste, sur une anfractuosité. En s’y faufilant, ils vont déboucher sur une savane enclose, vaste jardin totalement dérobé aux regards. Dans leur exploration, les rangers ne se savent pas observés par des sentinelles noires. Jugés immédiatement indésirables, les rangers vont voir leur sommeil perturbé par une attaque nocturne menée par Chaska, chef du village africain en avant-poste.
L’histoire initiée dans les dernières soixante pages du Tex 371, la moitié précédente clôturant le récit de Nizzi et Blasco, se continue dans les numéros 372 et 373 (pour moitié, la fin démarrant une nouvelle aventure de Nizzi et Gilbert). L’espace hors du temps est un filon largement exploité dans la littérature et la bande dessinée populaires. N’allant jusqu’à culbuter les époques, Claudio Nizzi rend plausible l’existence d’Africains échoués dans un havre du désert. L’effet obtenu, en confrontant des guerriers Noirs et des rangers est une réussite. Pourtant, l’attrait majeur provient du dessin de Carlo Marcello, vivace, travaillé, souple et précis, un régal visuel de tout instant.