[Le cycle de Cyann. T. 2, Six saisons sur Ilo | François Bourgeon, Claude Lacroix]

Mission accomplie pour ce deuxième tome du Cycle de Cyann ! L’aventure décolle. L’intrigue est un fil rouge qui saigne mais l’intérêt du lecteur ne se relâche jamais. Les auteurs ont compris que la découverte d’un monde nouveau, Ilo, peut se faire concomitamment au déroulement de l’aventure. Tout fonctionne. On cherche qui est le traître au sein de l’expédition sabotée et on prend le pouls de la planète aux multiples dangers avec un écosystème créé de toute pièce mais convaincant. La jungle poisse et pique. Gare au « dardule » avec « son concentré de pièges successifs » ! Le dénouement clôt l’histoire mais des portes restent ouvertes. Pour que le cycle prenne une dimension mythique, il faudrait sentir la mélancolie de l’héroïne, la fragilité de l’innocence, le fardeau écrasant de la solitude face au vide sidéral mais les clichés ont la vie dure et le romantisme benêt qui nimbe certaines scènes peuvent contrarier un projet plus ambitieux. Ainsi la relation entre Cyann et Ilui, sorte de Bertrand Cantat chamane, nomade, dresseur, à la flûte tarabiscotée mais mélodieuse. Elle : « Je ne sais pas demain… Je ne sais pas après… Mais je sais que je n’ai jamais été moins seule que cette nuit… Pourtant… Ce vide… Ce vide que j’ai là !... Il va m’aspirer tout entière si tu ne viens pas à mon secours… » Lui : « Aldalarann à l’équinoxe du treizième monde… A part toi, petite… J’ai rien vu de plus beau… » On dirait une réplique tirée du répertoire ringard d’un Jean-Pierre Marielle d’anticipation. Heureusement, d’autres personnages présentent une réelle stature. Le Vê, athlète géant, chauve, au crâne oblong, omniscient, est une trouvaille riche d’un potentiel à peine exploité. Cyann va devenir la « clé » des portes du Grand Orbe. L’aventure est donc derrière la porte. Il ne faut pas que les histoires s’empilent les unes sur les autres mais qu’elles donnent de l’ampleur au personnage central et rendent sa quête poignante. Vaste programme ! Plus d'un architecte en chantier a vu son oeuvre bringuebaler à mesure que les tomes s'accumulaient mais Bourgeon est un conteur hors pair, un bâtisseur d'histoire enchanté. Le pari est ouvert.

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Je ne suis pas du tout un "fana" de BD mais lire les notes de Franz c est déjà de la littérature.

Merci pour vos deux réactions.

J'espère ne pas avoir la dent trop dure ou la plume trop piquante mais j'ai beaucoup de mal à contenir mon ironie face au ridicule de certaines situations surtout quand la prétention et la vanité s'en mêlent. Je pense par exemple au cinéaste Luc Besson avec Le cinquième élément ou encore Le grand bleu. Ses films sont à pleurer de rire. Ca m'est d'ailleurs arrivé en pleine salle de cinéma : mon père à mes côtés, hiératique, fan de SF style Fleuve Noir, ne comprenant rien à mon hilarité et moi, souffrant, tellement j'avais les boyaux de la tête contractés par le rire. Chez Bourgeon et Lacroix, on sent un désir de bâtir un monde mais en même temps, on nage en pleine bouffonnerie. Cependant, François Bourgeon a de réelles qualités de conteur et le Cycle de Cyann se laisse lire, laborieusement pour le premier album puis très agréablement pour le second.

J'espère ne pas vous avoir dissuadé d'approcher Cyann.

Franz