mince comme un cheveux, ample comme l'aurore :
« à mesure que des pans de sa vie s’effondrent dans l’oubli, l’homme se débarrasse de ce qu’il n’aime pas et se sent plus léger, plus libre » Mais que devient l’émigré réfugié politique lorsque après vingt ans d’exil, il retourne dans son pays, face à ces anciennes amitiés, à sa famille ? Doit il endosser son fardeau culpabilisant son départ, effacer son autre vie qui n’intéresse personne ? Dans son pays natal il garde le statut de celui qui a abandonné les siens ; dans son pays d’accueil il s’est débattu bec et ongles, pour se fondre dans la masse, travailler sans rechigner, pour un jour espérer oublier de repartir chez lui lorsque le pays est à nouveau libéré.
Kundera nous décrit la misère de ses individus apatride à vie, à travers deux personnages emmurés dans leur inexistence profonde, irréversible.
« Loin du temps, de l’espace, un homme est égaré, mince comme un cheveu, ample comme l’aurore …(Queneau) » voici, Joseph, à qui la mémoire sélective lui permet d’oublier ses souvenirs détestables, d’effacer la réalité engoncée dans l’immobilisme larmoyant, et de s’abreuver du présent jusqu’à plus soif.
« …les deux mains en avant pour tâter le décor » (Queneau) c’est ainsi que Iréna qui traverse la vie sans intéresser personne, retrouve par hasard ce Joseph, une vague rencontre probable, sur laquelle elle s’imaginait construire un avenir plus radieux, espérant ensemble, se souvenir de demain.
Mais l’Ulysse en question, en proie aux désillusions tardives, ne peut se résoudre à élaborer un quelconque projet, et préfère imaginer sa Bohême comme autant de routes à parcourir, de carrefours à traverser et de rencontres à s’enrichir.
Avec Kundera, "il faut savoir apprécier des grands crus de la littérature et déguster l'eau de vie de la philosophie" (bertrand-môgendre)
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