Le long voyage de Léna choisit les méandres de la lenteur pour raconter la mise en place minutieuse et calculée d'un complot politique. A l'image du grand fleuve de Sibérie centrale, gelé une majeure partie de l'année, l'héroïne éponyme de la bande dessinée de Christin et Juillard, distante, froide, comme en retrait de la vie, finit par se réchauffer lorsque ses souvenirs remontent en surface tels les poissons du fleuve russe. Elle devient alors fréquentable et la vie lui sourit à nouveau à la fin de l'histoire. Décidément, la collection Long courrier chez Dargaud permet des rencontres fructueuses et inédites. Le récit de Pierre Christin mêle habilement l'histoire politique et l'actualité avec vraisemblance. Le dessin d'André Juillard, beau, charpenté, équilibré, lisible, mis en valeur par des couleurs aquarellées, apporte une résonance particulière à l'acte terroriste en train de se mettre en place de case en case. Les images paisibles, les décors en apesanteur, disent avec plus de force encore le drame qui s'ourdit. Tel un leïtmotiv, une pensée de Léna, ritournelle obsédante, ponctue le récit : "Ce qui est paisible est précaire".
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