Dans cette "comédie urbaine" (genre revendiqué sur la couverture, et que je ne connaissais pas), on a l'impression de lire une enfilade de clichés sur les cités, jusque dans la narration qui affecte un parler relâché et censé être (l'est, sans doute) celui des personnages. Prince, qui a mal tourné, qui joue au plus fin avec de plus gros délinquants, lesquels risquent de s'en prendre à son petit frère pour compenser. On a aussi Abi, la Mère Courage, qui tente d'élever tous les enfants que son veuvage lui laisse, de faire face à toutes les obligations et qui sent bien qu'elle ne porte pas que sa famille, que le poids de toute une imprégnation sociale est en train de détériorer la bâche qu'elle a essayé de tendre au-dessus d'eux.
Si l'humanisme du narrateur externe ne se montrait pas de temps en temps, j'avoue que j'aurais eu très vite assez de l'histoire, ses torrents de clichés, comme je l'ai déjà dit, le sexisme automatique dès qu'un des personnages rencontre une femme. On comprend alors qu'il s'agit d'une exposition et non pas d'une validation. Je me suis aussi accrochée parce que j'avais beaucoup apprécié l'intervention-performance de l'auteur lors d'une rencontre en librairie, dont la poésie, la tendresse, l'humanisme m'avaient touchée et que j'essayais de les retrouver dans un texte qui, au début, m'en avait paru presque dépourvu. La plupart des mots-clés (les fameux "tags") que j'en mets sont nouveaux dans cette base (et encore, je ne les ai justement pas tous mise, consciente que ce n'est pas une lecture habituelle). Il faut donc prendre ma note de lecture avec précaution : je ne suis pas une inconditionnelle du genre ce qui ne veut pas dire que le texte lui-même ne fasse pas les délices de quelqu'un qui recherche à l'inverse ce genre de lectures. Je crois avoir déjà écrit ici une fois ou deux le malaise profond dans lequel me plongeait toute allusion au crime organisé, qui instrumentalise les pauvres et prétend les aider...
J'ai interrompu ma lecture, je l'avoue, après une scène de torture crue, bien dans la manière qui fait que je me tiens loin des documents comme des fictions tirées de ces réseaux criminels, ce qui fait que je me permets moins que jamais de risquer une "note". Le côté "comédie" m'a échappé.
Citations :
- J'le jure sur la carcasse d'ma vieille, des fois j'ai l'impression qu'on sert à rien.
- Ah bon, mon vieux ? Juste des fois ? Moi, c'est tous les jours que je me dis qu'j'suis juste une marionnette dans une comédie à la con. On m'paye pour glander d'vant une casserole de lait : en attendant qu'elle déborde, tout l'gratin veut dormir en paix. Tu crois quoi ? Les mecs qui crèchent au Parlement, ils ne savent même pas à quoi elle ressemble, la vie, derrière leurs rideaux d'velours ! Et not'boulot, c'est d'veiller à c'qu'ils le sachent jamais. Comme les mômes qu'on nous envoie mater, on est qu'des pions sur un échiquier... Sauf que cette fois, ça va pas être de la tarte. J'ai comme dans l'idée qu'les mômes veulent tout raser. (...)
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