[Un putain de salopard. 1, Isabel | Régis Loisel ; Olivier Pont]
La nuit du jaguar.
En 1972, Max Heurtebise, jeune homme à la recherche de l’identité de son père, débarque au milieu de nulle part, dans la forêt amazonienne. Alors que sa mère vient de mourir, Max ne dispose que de deux photographies avec deux hommes différents non identifiés. Lequel est son père ? En revenant sur les lieux de sa petite enfance qu’il a quittés à l’âge de trois ans, Max espère retrouver des témoins et tracer son histoire familiale. En débarquant, Max rencontre deux jeunes infirmières, Christelle et Charlotte, en partance pour travailler dans un dispensaire à proximité d’un camp forestier. Voyageant de concert jusqu’à la première bourgade et guidés par Corinne, la troisième comparse du trio d’amies, Max croise Margarida, propriétaire du bar restaurant Le Toucan qui reconnaît un des hommes sur une photographie, selon elle « un putain de salopard ». Isaac Aronstein, le vieux prêteur sur gages, se souvient lui aussi vaguement des deux hommes. En avançant dans le flou des souvenirs et des ambiances volatiles, Max s’oriente ostensiblement vers le camp Hermann, en pleine jungle. En chemin, sur la piste défoncée, Max est très vite confronté à la loi des bas-fonds. Il doit fuir dans la sylve s’il veut en réchapper mais la loi de la jungle n’en est pas moins implacable.
Grand magicien des éthers entêtants, raconteur hors pair d’histoires émouvantes et dessinateur exceptionnel, Régis Loisel sait pétrir la boue des turpitudes humaines pour en extraire un or alchimique, sa série Peter Pan (6 albums, 1990-2004) en exprimant la quintessence. Son scénario est simple et accrocheur. Le récit se dévide avec vivacité, jalonnant le parcours des protagonistes sur des pistes savonnées par avance. L’histoire démarre cool et bon enfant, routarde et nantie de bons plans mais la réalité reprend vite le dessus, gangrenant la vie et l’innocence si tant est qu’elle existe dans ce bas monde où rapines et prostitution, meurtres et corruption tiennent le haut du pavé. Olivier Pont délivre une partition graphique sur le tempo d’une pulsation cardiaque allant crescendo. Lui aussi excelle à fluidifier et à tonifier ses cases avec un graphisme enlevé et des cadrages dynamiques. Son style parfois cartoonesque rappelle son travail dans l’animation et vient heurter intelligemment la réalité dépeinte, la rendant plus effrayante encore, par contraste. Le premier tome se clôt sur un suspens qui invite à poursuivre l’aventure amazonienne.
----
[Recherchez la page de l'auteur de ce livre sur
Wikipedia]
Afficher toutes les notes de lectures pour ce livre