« Risus abundat in ore stultorum », « Non ridere sed intelligere » (Spinoza)... : le rire semble avoir mauvaise presse auprès des philosophes. Excepté chez Platon qui, dans
La République, fait lancer à Glaucon par Socrate cette belle blague féministe : « Il n'y a guère plus de différence entre un homme et une femme qu'entre un chauve et un chevelu » (cit. p. 13) [et compte tenu de tout ce que nous savons sur l'antiféminisme de sa pensée ainsi que du contexte culturel dans lequel elle se développa, nous n'avons aucun doute qu'il s'agissait bien d'une plaisanterie] ; excepté Nietzsche qui, dans
Par-delà le bien et le mal, clame : « J'oserai même établir une hiérarchie des philosophes d'après la qualité de leur rire » (cit. en exergue et passim) ; excepté Bergson qui, comme il est notoire, consacre son essai le plus connu au rire (1900) ; excepté Michel Foucault dont tous ceux qui l'ont connu, et notamment Roger-Pol Droit, s'accordent à rappeler qu'il avait « une palette de rires très divers » (p. 188)... Et il en va ainsi, d'exception en exception, pour 30 philosophes, depuis l'Antiquité jusqu'à nos contemporains, dont nous avons peut-être méconnu, peut-être mal compris le côté plaisantin.
Ce petit livre a pour but d'aligner des brefs vade-mecum – pour lycéens ou étudiants ou pour le lecteur qui souhaite rafraîchir sa mémoire – sur ces penseurs très connus, lesquels, en quelques pages seulement, illuminent l'essentiel d'une pensée ou d'une biographie d'un coup de projecteur parmi les suivants : soit par la présence d'une pépite de drôlerie, éventuellement involontaire, mais néanmoins hilarante dans la manière dont elle nous apparaît aujourd'hui (par ex. chez Descartes ou chez Heidegger) ; soit par la découverte d'une facétie volontaire mais dissimulée à l'intérieur d'une pensée austère (ainsi chez Marx) ; soit par un intérêt avéré pour le comique (comme chez Freud), ou pour le sérieux, dans des relations problématiques et en dernier ressort très drôles avec son contraire (comme chez Sartre et chez Wittgenstein).
La démarche est gaie, non anecdotique ; totalement inattendue est l'image qu'elle nous offre de la plupart des protagonistes ; certains exemples sont de nature à être retenus – et peut-être recyclés dans une tablée conviviale. Hélas la fugacité des regards portés sur chaque philosophe n'est pas propice à en imprimer un souvenir pérenne.
Cit. :
« Nous passons notre temps à jouer avec les mots. Les plaisanteries sont un jeu de langage. Wittgenstein pensait que l'on pourrait écrire un texte philosophique sérieux constitué uniquement de plaisanteries, ce qui était une bonne plaisanterie. » (p. 165)
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