Paysages avec figures absentes.
Bien que le rapprochement avec le recueil poétique de Philippe Jaccottet puisse paraître gratuit, « Paysages avec figure » de Claude Dourguin n’en dégage pas moins quelques similitudes avec notamment la thématique centrale du paysage, beaucoup moins naturel, assez souvent modelé par l’homme chez l’écrivaine quand Jaccottet féconde son regard et enrichit son écriture à partir d’éléments naturels bruts (bois, blés, prés, cerisier, etc., identifiables et circonscrits sur le terrain). La description qui en découle naît pourtant d’une même promenade, d’une excursion, d’une randonnée où la marche à pied apparaît comme le modus operandi chez les deux auteurs ce qui rend le propos si intéressant. Toutefois, Claude Dourguin ne précise qu’au détour d’une phrase la toponymie, préférant capter et restituer l’essence particulière d’un site traversé (vignoble angevin du Layon, île finistérienne de Batz, région himalayenne de Darjeeling, côte napolitaine, etc.), les chapitres s’enchaînant naturellement, ponctués d’une discrète feuille de chêne grisée. Le vocabulaire précis creuse alors le paysage pour l’affouiller, le garnissant du moelleux des mots, véritable cautère posée sur une mémoire cicatricielle quand le temps ajoure les souvenirs et creuse des béances dans la réalité durement étreinte du paysage. Rien ne dure hors les souvenirs couchés sur le papier. L’auteur semble s’évertuer à saisir verbalement le réel afin de témoigner d’une plénitude, de laisser la trace d’un regard caressant. Si Julien Gracq, innommé, n’est jamais loin, Claude Dourguin règle ses ardoises littéraires et ajuste ses trajectoires géographiques selon une déambulation sentimentale et aimantée.
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