« La première justice c’est la conscience ».
Monsieur Madeleine, maire de Montreuil-sur-Mer est un notable respecté qui, dans son souci de rédemption et de probité, ne peut empêcher le surgissement du passé et l’accomplissement d’erreurs funestes. L’inspecteur Javert le soupçonne d’être Jean Valjean, ancien forçat du bagne de Toulon. Fantine le tient responsable de son licenciement et de sa déchéance. Madeleine/Valjean va donc s’opposer directement à Javert afin d’éviter l’incarcération de Fantine, injustement accusée d’avoir agressé un bourgeois odieux. Fantine doit se saigner afin de répondre aux exigences exorbitantes des Thénardier qui exploitent et maltraitent sa fille Cosette. Si elle part en prison, elle ne pourra plus se prostituer et gagner de quoi satisfaire la voracité des aubergistes de Montfermeil. Valjean a parfaitement saisi la situation et ne veut que le bien de Fantine déjà très diminuée par la maladie. Confronté à l’imminence de la mort de Fantine, Jean Valjean est face à un problème cornélien, courir à Montfermeil et réunir enfin Cosette à Fantine ou bien se rendre séance tenante au tribunal d’Arras afin d’innocenter un simple d’esprit passant pour être Valjean malgré ses dénégations et risquant le bagne à perpétuité.
Le tome 3 du manga de Takahiro Arai clôt le tome 1 des Misérables de Victor Hugo, intitulé Fantine. Il relate le choc entre deux conceptions de la justice, l’une, humaniste, incarnée par Valjean, l’autre, rigoriste personnifiée par Javert. Le combat titanesque entre le lion et le loup, Valjean et Javert, les deux monstres sacrés de la littérature est admirablement restitué dans le manga. Bien que les physionomies dessinées tranchent avec les représentations archétypales, les personnages n’en dégagent pas moins charisme et puissance. Javert, une moitié de visage dissimulée derrière une mèche blonde tombante, biface intérieurement fêlé, semble redoutable et acculé ; Valjean, la barbichette post-moderne, est un colosse juvénile qui ne fait pas son âge, 54 ans à l’époque des faits en 1823. Il est particulièrement touchant quand il se débat avec lui-même, cherchant des excuses à sa conduite mais toujours avec l’œil de la conscience qui le fixe implacablement. Des crispations pourraient apparaître par rapport aux libertés prises et aux exagérations imposées mais cela ferait méjuger d’une œuvre forte, toilettée, revigorée et enrichie de belle manière par un mangaka doué et respectueux.
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