[La marche du mort : Lonesome Dove : les origines | Larry McMurtry]
A l’ouest de l’Achéron.
Comme dans « l’Enfer » de Dante, « La marche du mort » est introduite par un chant préliminaire, une expédition de reconnaissance visant à ouvrir une route sûre pour les diligences, à l’ouest du Pecos, jusqu’à El Paso. De nombreux personnages apparaissent, s’entrecroisent et s’activent à de multiples tâches : seller une jument, pécher une tortue, exposer des scalps, etc. De cette troupe hétéroclite et vivante émergent les diverses figures qui vont lier leurs destins tout au long d’une chevauchée hallucinée. Gus et Call, pauvres, désœuvrés et inexpérimentés mais jeunes et pleins d’allant vont rejoindre la patrouille alors inorganisée des Texas Rangers. Cet épisode introductif est un peu déstabilisant par l’ampleur de la fresque qui se met en place avec la multiplicité des protagonistes lestés d’une histoire propre et par la mission même qui ne paraît être qu’un simple prétexte pour aller tenter le diable et l’aventure. Le lecteur peut peiner à s’y retrouver à l’instar des rangers, se demandant si c’est du lard ou du cochon jusqu’à ce que les Comanches surgissent. Buffalo Hump, chef de guerre indien, s’impose alors, redoutable et inoubliable. La 2e partie du roman relate l’expédition de Santa Fe et occupe les quatre cents pages restantes. Deux cents hommes cornaqués par le colonel autoproclamé Caleb Cobb partent avec l’intention de s’enrichir et d’occuper Sant Fe au détriment des Mexicains mais la concrétisation des rêves devra passer à la moulinette de l’âpre et rugueuse réalité du terrain et du contexte : la nature déchaînée, les redoutables Comanches, les Mexicains intraitables, les féroces Apaches et le désert de la mort à traverser, autant de cercles infernaux à franchir et un éden toujours insaisissable, en éternelle ligne de fuite. Le dépouillement est total. Les troupes sont décimées, les hommes sont éperdus mais l’avancée perdure au-delà des forces et de l’espoir.
Prémices de Lonesome Dove (1985) ancré en 1870, western littéraire majeur, « La marche du mort » (1995) écrit dix ans après le chef-d’œuvre de Larry McMurtry se situe chronologiquement en 1840. Suivront « Lune Comanche » (1997) paru seulement en 2017 en français toujours aux éditions Gallmeister et développant les aventures dans les années 1850-1860 puis « Streets of Laredo » (1993) concernant le début des années 1890 et encore inédit en France. L’écriture vivante, les dialogues nerveux, les situations surprenantes et la mécanique implacable de la tragédie en marche accrochent, surprennent et entraînent le lecteur lui aussi dépassé par l’ampleur de la nature et la geste des hommes du désert. Les Texans débarqués dans ces confins ne sont jamais à leur place, étrangers sans cesse ballottés, meurtris et ruinés par les forces de la nature, des bêtes, du désert et des Amérindiens.
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