[Criminal. 5, Pauvres pécheurs | Ed Brubaker ; Sean Phillips]
Les pontes meurent aussi.
Tracy Lawless reprend du service dans le cinquième tome de la série. Fidèle à une parole donnée, bien décidé à éponger la dette de son frère défunt, Tracy est le nervi de Mister Hyde, âme tordue, vieux mafieux fielleux qu’aucun bon docteur Jekyll ne saurait racheter. Tracy Lawless ne peut se résigner à n’être qu’un exécuteur zélé, un tueur aveugle. Il lui arrive de tergiverser quand la victime désignée ne lui semble pas aussi coupable que Hyde voudrait le croire. Chester, tueur patenté de Hyde, ne connaît pas le doute et il a charge de surveiller en coulisse les agissements de Lawless jugé peu fiable. Confronté à une série de meurtres concernant des personnalités intouchables de la pègre locale, Hyde lance Lawless afin qu’il fouine et dégote rapidement le coupable. Tracy n’a aucun don d’enquêteur, nulle méthode d’investigation. Il part donc à la pêche aux informations avec l’arme qu’il maîtrise le mieux, ses poings. Ce pourrait être sa dernière mission avant de retrouver sa liberté mais Tracy Lawless évolue en eaux troubles. Outre Hyde, sa suspicion et son irritabilité, Tracy doit faire avec la femme et la fille de Hyde, toutes deux imprévisibles. A cela s’ajoute un enquêteur de la police militaire pugnace sur la piste du déserteur Lawless ainsi que l’implication d’une triade chinoise sourcilleuse.
La plongée dans les bas-fonds labyrinthiques et les méandres du mal est superbement menée par le scénariste Ed Brubaker qui possède l’art de recycler les clichés en les enjolivant de noir. Les morts s’empilent et Lawless s’enfonce toujours davantage comme si une nouvelle porte poussée ouvrait une boîte de Pandore dans une ruelle sans issue. Pour le lecteur rivé à l’histoire, il est impossible de décrocher avant la dernière page sniffée jusqu’à l’ultime case. Sean Philipps met tous ses dessins sous tension, travaillant ou simplifiant son trait selon l’expressivité recherchée, densifiant la présence des personnages à travers notamment leurs expressions non-verbales. La mise en couleur de Val Staples concourt grandement à la puissance expressive de l’ensemble.
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