Comme l'ibère, le gallois est rude. Quand il fait partie des réprouvés de la vie, le gallois se fait très très rude. Le livre conte l'histoire de cet enragé de Ianto, sorte d'enfant sauvage et bizarre grandissant dans un Pays de Galles rural et pauvre, accompagnant dans leurs beuveries et leurs soirées de défonce quelques autres paumés, guère moins sauvages que lui. Mais les autres parlent alors que lui, Ianto, se tait ou ne lâche que de rares paroles, de temps en temps. Quelle est l'origine de ce mutisme, qui est vraiment Ianto ?
Le livre est d'une force incroyable. La rudesse et la sauvagerie des personnages colle à ce pays de tempête. La nature est ici à l'oeuvre mais pas celle des "espaces verts" ou des "parcs naturels". Ici, rien n'est mesuré, tout est excessif. L'hypocrisie anglaise y est honnie. Pourtant au milieu des déchainements de toutes sortes qui jalonne ce livre, quelques fleurs, ou plutôt des promesses de fleurs, tentent de pousser : c'est Gwenno, une des filles de la bande qui bizarrement ne fuit pas ce monstre de Ianto. Sait-elle ce qu'il peut lui en coûter ? C'est aussi Danny, un autre comparse qui cherche à percer le mystère de ce gars pas comme les autres en dépit des rebuffades de ses amis. Eux refusent que les choses soient justes "comme ça", ils refusent de s'en tenir aux jugements simplistes.
C'est un livre violent qui parfois dérange par des descriptions très crues. Amateurs de dentelles ou de point de croix s'abstenir ! Il m'a fait penser par ce thème de la révolte extrême d'un jeune paria au "Seigneur des porcheries" de Tristan Egolf. Le Middle West américain n'est toutefois pas la côte ni les montagnes galloises et l'écriture de Niall Griffiths est emprunte de la fureur des tempêtes qui secouent son pays, celle d'Egolf évoquait davantage les tornades qui en une nuit peuvent "balayer" une petite ville isolée dans la plaine. Dans les deux romans, les éléments se déchainent. Et la misère, financière et morale, le thème d'un pays occupé par un envahisseur méprisant et méprisable, les bouseux et les "trolls" chez Egolf, les anglais chez Griffiths, servent de toile de fond à ces deux romans, dont on ne peut sortir indemne.
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