La bonne parole
Jean-Mi maîtrise son argumentaire de vente et travaille le client sur recommandation afin de lui refourguer sa Bible illustrée : « […] magnifiques volumes reliés,… des illustrations qui rendent le Texte sacré plus vivant et plus concret… ». Pas toujours fin psychologue, Jean-Mi commet la funeste erreur de traiter Raymond, un client potentiel, en demeuré patenté. Introduit dans la demeure de Raymond, Jean-Mi remarque le mécanisme complexe qui semble protéger un coffre au trésor d’autant fabuleux qu’il reste invisible. Dès lors, aussi effrayé qu’attiré, Jean-Mi n’a plus qu’une idée en caboche, faire main-basse sur la bonne fortune, celle de l’émancipation et de l’amour par l’argent car Jean-Mi est toujours célibataire chez sa maman fumeuse et fulmineuse.
Rocambolesques et burlesques malgré eux, les personnages du roman de Jean-Paul Demure retiennent l’attention mais ne captivent pas. Cela dépend probablement de la faiblesse des motivations et de la psychologie peu fouillée de chaque protagoniste. Les gorilles de Monsieur Raymond pourraient tirer la couverture à eux en se lançant dans un baroud d’honneur si la foldinguerie ne guettait pas à chaque tournant. Les policiers du cru ont de tristes couennes, têtes de lard rubicondes sans consistance de l’ère post-giscardienne. Ils détonnent et font tâche aujourd’hui mais personne ne sort grandi de cette balourdise improvisée. Le lecteur est loin de l’extraordinaire « Fin de chasse » du même auteur, bouleversant, profond, agencé comme une tragédie antique. Il lui reste encore à remonter le filon de l’œuvre d’un auteur français discret et talentueux.
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