[Personnages désespérés | Paula Fox, Jonathan Franzen (Préfacier), Marie-Hélène Dumas (Traducteur)]
Il paraît que l'argent ne fait pas le bonheur...
Apparemment, c'est vrai. La preuve par le roman de Paula Fox, qui s'intitule d'ailleurs "Personnages désespérés", et dont les héros, suffisamment à l'aise pour n'avoir aucune préoccupation d'ordre financière, mènent pourtant une existence des plus déprimantes...
Otto et Sophie, mariés depuis plusieurs années, ont la quarantaine, pas d'enfant, et vivent à Brooklyn Heights, qui perd peu à peu sa dimension populaire pour devenir le nouveau quartier bobo en vogue.
Deux événements viennent bouleverser la tranquille routine de ce couple à priori sans histoires...
Sophie se fait mordre la main par le chat errant qu'elle s'était habituée à nourrir, la blessure prenant rapidement un aspect inquiétant.
L'associé et ami d'Otto a quitté le cabinet juridique qu'ils dirigeaient tous les deux, invoquant une incompatibilité grandissante entre leurs conceptions respectives de la justice.
En réalité, ces événements vont mettre en lumière les failles et les limites habituellement dissimulées sous les apparences d'une vie qui se veut "normale" et paisible. A leur suite, les petits tracas s'enchainent, introduisant dans la prétendue sérénité du quotidien des Bentwood une forme d'insécurité déstabilisante et anxiogène.
Il ne se passe finalement pas grand-chose dans ce roman qui pourtant n'ennuie jamais, le talent de Paula Fox résidant dans la finesse avec laquelle elle exploite le moindre détail, pour dépeindre, par touches, le délitement de la belle mais fragile façade derrière laquelle les héros abritaient leurs doutes, et leur immense désœuvrement. Car hormis le confort et la réussite sociale, que possèdent-ils ? Ils n'ont ni famille, ni véritables amis, leur existence manque cruellement de stimulations, d'émotions, et leur relation elle-même semble comme vidée de toute substance. Ils vivent centrés sur eux-mêmes mais n'en retirent aucune satisfaction.
L'écriture est à la fois légère et précise, et certains dialogues sont savoureux, exprimant un humour grinçant par lequel l'auteure raille la superficialité et l'affectation qui président aux rapports entre ces membres de la bonne société qui peuplent son roman.
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