Wally Lamb propose avec "nous sommes l'eau" une fresque impressionnante, foisonnante comme à son habitude, qui m'a parue beaucoup plus convaincante que "le chagrin et la grâce".
Le récit mêle les parcours de plusieurs personnages, qui ont vécu à des époques différentes : pour commencer, le peintre de génie Josephus Jones, mort dans des circonstances étranges alors qu'il n'a que 30 ans, et qui connaît une gloire posthume qui ne lui a pas été accordée de son vivant, notamment du fait qu'il soit noir.
Il y a également Belinda, une jeune fille issue d'une famille très stricte et dont le père campe des positions extrêmes en matière de droits civiques (il est donc complètement raciste).
Des années plus tard, la maison de Jones est achetée par Annie et Orion, un couple qui va y élever ses trois enfants.
L'histoire se centre rapidement sur Annie, qui est elle-aussi passionnée de peinture, et quitte Orion pour se rapprocher de New York où elle veut faire éclore son art, avec le soutien de Viveca, qui est sa galériste, et avec qui elle entretient bientôt une relation amoureuse.
Le roman est tourné vers un événement central, qui est le mariage d'Annie et de Viveca.
Dans ce contexte, la famille d'Annie s'est déchirée : son fils Andrew, qu'elle a malmenée lorsqu'il était enfant sans qu'Orion n'en ait connaissance alors, est fiancée à Casey Lee, une jeune fille de bonne famille où le mariage gay n'est ni toléré ni reconnu; sa fille Ariane, qui a toujours été de bonne composition et vient de procéder, dans le plus grand secret, à une insémination artificielle pour tomber enceinte, et la cadette Marissa, plus révoltée en un sens que ses aînés, qui admire l'art de sa mère et la liberté de sa future belle-mère, et tente pour sa part de percer en tant qu'actrice, quitte à se retrouver dans des situations parfois dangereuses.
Chacun réagit différemment à l'annonce du mariage d'Annie et Viveca.
De son côté, Annie pense avoir enfin trouvé la sérénité, et le moyen de maîtriser ses démons, qui l'ont dévorée pendant des années.
Car Annie cache jalousement un secret qui l'a suivie toutes ses années, et qu'elle n'a jamais révélé à personne, concernant la mort dans une inondation de sa mère et de sa petite soeur Gracie lorsqu'elle n'avait que 5 ans, et qu'elle a été sauvée par son cousin Kent, un adolescent abusé sexuellement pendant son enfance, qui a nourri depuis une déviance particulière.

Comme à son habitude, Wally Lamb produit un roman fleuve qui regorge de personnages construits, à la fois authentiques et complexes.
Certes, on peut se noyer dans cette fresque, mais la cohérence globale est soignée, le style nous emporte, si bien qu'à mes yeux, ce livre est une réussite, et me réconcilie avec l'auteur après son précédent roman qui m'avait paru beaucoup plus décousu.

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