« Lulu femme nue » n’est pas une bande dessinée pornographique comme son titre pourrait le suggérer mais bien au contraire elle relate pudiquement la mise à nu d’une femme, Lulu, qui, à l’entrée de la quarantaine, fait un pas de côté, hors du carcan social et familial. Un entretien d’embauche raté, la voilà résignée, amère et solitaire, un peu à la dérive dans une ville étrangère. Elle ne rentre pas immédiatement chez elle retrouver mari et enfants. Elle décide de manger et dormir à l’hôtel. De rencontres en déambulations, Lulu aboutit dans une petite ville portuaire : « C’était il y a presque trois semaines, début octobre. C’était une de ces journées parfaites, envahies de lumière tiède. » Lulu est en vacance. Elle a décroché de sa vie sclérosante. Elle est disponible, ouverte, à l’écoute d’elle-même, en accord flottant avec son entourage neuf et bienveillant : « Elle a peu mangé. Pas mal marché. Elle dort très bien. » Elle apprend à relativiser ce qu’elle perçoit. Elle va retrouver le rire, s’incarner, se libérer et ressentir l’amour pour un homme inconnu, ancien repris de justice que ses deux frères protègent avec un dévouement touchant. Pendant ce temps, le mari fulmine mais ne remet pas son propre comportement en question. Il ne semble rien comprendre au lâcher prise de sa femme.
Etienne Davodeau (né en 1965) est un auteur précieux car il sait raconter dans la bande dessinée les petits riens de la vie et trouver le ton juste, en léger décalage avec les personnages. Ainsi, dans « Lulu femme nue », l’histoire est rapportée par l’entourage de Lulu, un ami et sa fille. Le lecteur n’est jamais dans la tête de Lulu. Il peut se poser à côté d’elle et la sentir évoluer au gré de ses humeurs. Les sentiments de délivrance et de liberté s’en trouvent amplifiés. Le dessin est en adéquation avec la narration, sans éclat et sans effet de manche mais avec une justesse troublante. La réalité n’en est que mieux restituée et les sentiments partagés. Les couleurs aquarellées concourent à la fluidité de l’histoire et rendent magnifiquement les atmosphères transparentes des bords de mer.
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