Je reviens sur les terres ancestrales normandes dans le nord Cotentin, à la recherche des déferlantes. Je marche dans la région la plus nucléarisée du monde et malgré la hideur déferlant, je cueille encore en chemin des fragments des paradis perdus. A l’étape à Biville, je tombe sur le Petit Spirou intitulé : « C’est pour ton bien ! ». J’imagine que le titre mange-tout m’est aussi destiné. Peu enclin à lire les suites (Blake et Mortimer, Astérix, Lucky Luke, etc.), je boude un temps puis, de planche en planche, je dois admettre que le dessin de Janry est plaisant, dynamique et personnel, dans l’esprit de ses prédécesseurs mais en avant. Le Petit Spirou est le pendant de Titeuf, moins Tchô devant mais peut-être plus touchant par derrière. Les institutrices de Janry ne montrent qu’un minuscule carré de leurs dessous et tous les stylos des écoliers se décapsulent en chœur. Surprenante tante travestie ! Le Petit Spirou effleure du doigt les travers et les détresses de l’humanité mais se cantonne dans sa part enfantine. Politiquement correct, le futur groom des hôtels chicos n’en pince pas moins du regard les rondeurs tendues et les cambrures extrêmes des femmes ingénues. C’est dans l’innocence mutine que se révèle le mieux la perversité polymorphe du polisson cramoisi. Son uniforme et son chapeau rond, rouges en disent long sur ses émotions secrètes.
Je quitte Tome et Janry ; j’esquive l’atome et j’en ris (jaune).
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