En 2010, l’Afrique du Sud accueillera la coupe du monde de football.
La gageure, pour le gouvernement post apartheid, est de donner du pays l’image d’une nation réconciliée, apaisée… Pari difficile, voire quasi impossible, en cette année 2007, qui voit les statistiques de la délinquance culminer à des sommets jamais atteints, le taux de pauvreté n’ayant rien à leur envier… : « La première démocratie d’Afrique est devenue le pays le plus dangereux du monde ».
Drogue, guerre des gangs, trafic d’armes, sida…, les fléaux qui déciment la population des townships se comptent par dizaines, les premières victimes en étant les enfants.
Ajoutez à cela la ténacité des rancunes opposant non seulement noirs et blancs, mais aussi les ex-membres des diverses factions plus ou moins extrémistes qui, du temps de l’apartheid, luttaient les unes contres les autres (1), et vous aurez, peut-être, une petite idée de la morosité, du pessimisme qui se dégagent du dernier roman de Caryl Férey, « Zulu ».
L’intrigue dudit roman débute avec la découverte du cadavre défiguré d’une jeune blanche, dont l’autopsie révèle la présence dans l’organisme de substances inconnues. C’est l’inspecteur Ali Neuman qui est chargé de l’enquête. Il est noir, d’origine Zouloue, et garde en lui les stigmates du traumatisme d’avoir vu, enfant, les miliciens de l’Inkatha torturer puis assassiner son père et son frère aîné.
Ses investigations vont le mener sur des pistes aux ramifications multiples, compliquées par des apparences trompeuses, la conclusion amenée par une intensité dramatique crescendo se révèlant quant à elle particulièrement glaçante…
Ayant lu du même auteur « Haka » et « Utu », je n’ai pas été surprise par la noirceur de cet opus. Ici aussi, la mort et la violence sont omniprésentes, et Caryl Férey ne manifeste envers ses personnages aucune compassion, ne leur épargne aucune épreuve.
C’est un récit par conséquent très fort, et ce bien au-delà des aspects de l’intrigue policière. On est à la fois touché par les héros faillibles de « Zulu », à qui leurs zones d’ombre et leurs défaillances confèrent des personnalités complexes, et atteré par l’état des lieux catastrophique que dresse l’auteur de ce pays qui, en dépit de l’espoir qu’a pu susciter la fin de l’apartheid et l’accession de Nelson Mandela au pouvoir, se retrouve au bord du désastre.
Un roman à la fois dur et captivant…
(1) Plus de détails ici :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Inkatha_Freedom_Party