[Cap Horn. T. 2, Dans le sillage des cormorans | Christian Perrissin, Enea Riboldi]
Le second tome de Cap Horn débute par une carte pleine page représentant le fascinant labyrinthe fuégien en Amérique du Sud. Des encadrés relatent, selon des points géographiques, l’histoire déployée dans le premier volume. Il s’agit-là d’un rappel particulièrement intelligent, efficace et original de l’épisode précédent. La page tournée, comme dans Google Earth, on zoome sur la mission d’Oushouaya tenue par le révérend Thomas Bridges depuis vingt-quatre ans. Orth embarque au petit matin, avec la belle Anna Lawrence, suivie du révérend, contraint et contrarié par la désinvolture de Orth, sur un vapeur « emprunté » à un officier sourcilleux et déchu, Alejandro Lagarigue. Son but est de ramener à la mission l’officier de santé Jules-Edouard Frossard afin qu’il soigne la jambe gangrenée de Duca, l’ami d’Orth. A noble intention, catastrophe annoncée ! Les canaux sont des cimetières liquides. Que le vent tombe de la montagne puis s’engouffre dans le défilé et le moindre bateau se trouve violemment secoué ! En quelques instants, le « vent du diable » transforme une mer d’huile en mælstrom dantesque. Ici, point de déchaînement météorique ! La chaudière du vapeur explose et les trois protagonistes se retrouvent in extremis à l’eau. Arrivent la nuit et le froid. Il va falloir survivre. Les Indiens vivent nus. Les Européens ne savent comment contrer les éléments naturels, véritables pièges mortels.
Les vingt premières planches sont en tout point remarquables : narration fluide, personnages potentiellement riches, paysages au diapason, etc. Le tissage entre les Blancs, les aborigènes et la nature est fin et habile. L’intrigue se découd un peu mais les paysages poignants prennent habilement le relais. Dans le sillage des baleines, le vapeur semble bien petit. Ensuite, les points de vue se multiplient et diluent un peu l’attention du lecteur. L’équilibre n’est pas complètement trouvé. Faudrait-il donner plus de place aux Fuégiens, à l’histoire de Orth, à l’idylle entre Orth et Anna ? Choisir consiste à fermer des pistes. Celle des Indiens est probablement la plus captivante. Le scénario est bien documenté. On aimerait en voir plus sous le crayon élégant et précis d’Enea Riboldi. Ses mines sont probantes et ses portraits pleins de vérité. Qui se souvient des hommes des terres australes ?
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