L'enfant dont il question dans ce roman-témoignage ne sera pas nommé. Ni ses parents, ni sa soeur, ni son oncle, ni aucune des personnes qui entourent l'enfant. On ne saura pas non plus de quelle pathologie souffre cet enfant, on apprendra seulement qu'après le bref moment d'euphorie qui a suivi sa naissance, on découvre vite que quelque chose n'est pas normal. L'enfant est différent, il ne pourra pas parler, jouer, marcher comme les autres. Mais j'espère ne blesser moi-même personne en écrivant cela car on comprend aussi que dans ce livre c'est ce qu'on dit ou qu'on ne dit pas au sujet de cet enfant qui est au cœur du récit. C'est un récit sur le silence que les parents de l'enfant ont imposé à tous les proches, car chaque mot était possiblement un attentat fait à l'enfant.
Aussi chaque mot est ici pesé et soupesé et si l'auteur entend par ce livre rompre ce tabou du silence, il le fait avec le doigté du cambrioleur qui tourne la molette d'un coffre afin de l'ouvrir.
Avec des phrases brèves, percutantes, chargées d'émotion contenue et de poésie, Gilles Cervera nous donne à comprendre cette tragédie qui n'a pas été seulement celle de cet enfant différent mais aussi celle de toute la famille et de tous les proches. C'est une langue brute, mais jamais brutale, une langue sans fioriture mais pas sans nuance : à la différence du père de l'enfant qui juge, tranche, maudit, Gilles Cervera veut écrire l'histoire de l'enfant sans chercher d'explication mais en tentant de soigner, d'apaiser ce qui peut encore l'être, et ce, avec une belle confiance dans l'humanité.
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