C’est dans un monde géopolitiquement « inversé » qu’A.Waberi place son histoire. En effet, l’Afrique y est un continent développé dominant les états du nord (Europe et Amérique) ravagés par la famine, les guerres civiles, et dont les citoyens ne pensent qu’à émigrer vers le sud…Dans ce monde vit Maya, jeune femme originaire de Normandie adoptée par un médecin humanitaire d’Asmara (capitale de cette riche Afrique), qui va partir à la recherche de ses racines blanches.
Au départ, j’ai été un peu désarçonnée par cet univers, exact « négatif » du nôtre, tout en trouvant l’idée intéressante, d’autant plus que l’auteur y introduit de multiples touches d’humour en « africanisant » les références culturelles et commerciales de nos sociétés industrialisées. Ainsi, le MacDo devient le MacDiop, Nescafé est transformé en Néguscafé, et le film culte « A l’est d’Eden » rebaptisé « A l’est de Bangui »…Ensuite, je me suis demandée où il voulait en venir parce que finalement, hormis le changement de perspective, ce monde qu’il décrit ne présente guère de différence avec le monde réel, et la systématisation, dans les moindres détails, de ce renversement des rôles, finissait même par devenir agaçante, car sans but…
Et puis, en y réfléchissant, je me suis dit que tout simplement, il nous démontre que la « supériorité » des uns ou des autres ne dépend ni de leur race, ni de leurs origines, mais serait plutôt une question de conjoncture : la nature de l’homme est, au nord ou au sud, identique. En effet, qu’ils soient l’apanage des noirs ou des blancs, la richesse et le pouvoir les transforme en individus égoïstes et intolérants, soucieux de protéger leurs biens aux dépens de la solidarité humaine.
Tout au long du roman, A.Waberi alterne les descriptions de ce monde avec les états d’âme de son héroïne Maya, à laquelle il donne, par une écriture très poétique, une épaisseur et un charme envoûtant. Par son refus des injustices et de la misère dans laquelle sont laissés les exclus de sa société, elle apporte une touche d’espoir opposée à la noirceur de l’âme humaine.
Pour laisser le mot de la fin à l’auteur : « j’ai privilégié la farce (…) pour prendre le parti de rire de ce monde qui, tel qu’il boîte, ne me convient pas ».
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