C'est un roman à peu près inclassable que voici.
- Véritablement composé en deux parties, deux enquêtes en réalité, on pourrait d'abord le décrire comme un roman policier traditionnel organisé autour de deux personnages principaux : Madame Ha, sorte de Miss Marple asiatique, et Ariel Doulémi, jeune vampire qui sert de jambes et de bras de madame Ha, en plus d'être analyste chimiste (l'avantage des talents de vampire...). On trouve d'autres personnages traditionnels du roman policier : le chef de la police et ses agents, les brigands...
- Oui mais ça ne suffit pas : vous comprenez qu'on est aussi dans le domaine de la science-fiction ! Nous sommes sur une planète lointaine (Spica), colonisée il y a dix-sept ans. Nous sommes vraisemblablement très loin dans le futur, très loin dans l'espace (puisque rapidement les colons se retrouvent isolés des circuits de ravitaillement). Des races étranges forment un drôle de melting pot : centaures, hommes-chats ou autres vampires, avec des pouvoirs surprenants. Par exemple Ariel, vampire de son état, n'a rien à voir avec le vampire qu'on connaît dans notre imaginaire. Ce n'est pas un suceur de sang famélique qui opère exclusivement la nuit, mais ses talents lui permettent d'analyser et de reconnaître toutes sortent de substances chimiques (d'ailleurs son prénom, Ariel, serait-il un clin d'oeil ?). Très utile dans le cadre d'enquêtes policières.
- Pour conclure ce petit tour, on est aussi dans le domaine de l'utopie : utopie expansionniste de l'humanité, architecture utopique de cette ville qui se trouve sur le coin d'un toit d'un palais gigantesque, découpage des quartiers, mouvement révolutionnaire... Beaucoup d'éléments qui font réver :) Je vais me permettre une comparaison avec un autre domaine que je connais bien, la bande dessinée. Il faut dire que ce roman a une écriture très imagée et colorée. Je situerais donc cette histoire entre "Horologiom" de Fabrice Lebeault et le Cycle de Tschaï (scénarisé par Jack Vance).
Conclusion
Aller, je n'hésite pas : un excellent roman ! Oh, ce n'est pas le tournant génialissime et messianique attendu par les fans de la littérature de l'imaginaire, mais c'est très bien raconté, bien écrit (malgré quelques petites erreurs comme les sourires numérotés de Ariel, bof). On navigue entre humour léger (du style du couple Sherlock Holmes - Dr Watson) et instants graves mais très beaux (par exemple l'enterrement d'un centaure assassiné). On n'a pas affaire à des super-héros, mais ces personnages sont très attachants, et on n'a aucun mal à s'y identifier.
André-François Ruaud, en plus de son travail de directeur éditorial (aux Moutons Electriques), critique et analyste littéraire (à lire absolument ses essais sur les Transfictions et "Cartographie du merveilleux") se révèle un novelliste talentueux !

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