[Les Aventures de Tintin. T. 08, Le Sceptre d'Ottokar | Hergé]

La 8e aventure de Tintin, Le sceptre d’Ottokar, est d’abord publiée en noir & blanc en 1939, peu avant la Seconde Guerre mondiale. Casterman réédite en 2005 une version couleur datant de 1947. Bien que des détails diffèrent d’une édition à l’autre, le lecteur d’aujourd’hui peut se faire une idée assez précise du contexte politique de l’époque et sentir l’audace d’Hergé dans son engagement contre la montée du fascisme en Europe. L’auteur prend ses distances avec l’extrême-droite et Léon Degrelle alors que Tintin est publié dans le Petit Vingtième, journal édité par la droite belge conservatrice.
Müsstler (patronyme transparent fusionnant Mussolini et Hitler) est le chef suprême de la Garde d’Acier syldave. Il fomente l’anschluss (l’absorption) de la Syldavie par la Bordurie, autre pays des Balkans, limitrophe et expansionniste. Tintin est emporté dans l’histoire, d’abord de façon fortuite. Il trouve une sacoche sur un banc public et la rapporte à son propriétaire, le professeur Halambique, spécialiste de sigillographie (qui consiste en l’étude des sceaux). De fil en aiguille, le journaliste reporter est alerté par une série d’événements troubles (menaces, colis piégé, enlèvement…) et décide de servir de secrétaire au professeur. Halambique a de curieuses habitudes comme celle qui consiste à jeter au sol, dans son appartement, des restes de cigarettes allumées. Milou en fait les frais et se fait rôtir le dos. Tintin et Alfred Halambique partent en Syldavie. Le professeur a curieusement cessé de fumer et a perdu sa myopie. Tintin doute et se raisonne. Pourtant, toute une machination est en train de s’ourdir pour dérober le sceptre, symbole de la royauté. En effet, si le roi de Syldavie, Muskar XII ne peut le brandir lors de la Saint-Wladimir, il sera contraint d’abdiquer. Les péripéties s’enchaînent, les gags, les clins d’œil et les invraisemblances aussi (l’os de diplodocus dérobé au musée par Milou, la première apparition de la Castafiore qui dépite Tintin par son chant lancé à toutes vrilles dans le taxi, le florilège d’idioties incombant aux Dupondt, l’atterrissage sans parachute et sans bobo dans une charrette de foin, les apparitions d’Hergé et de Jacobs pages 38 et 59…). Si le ton est léger, le fond demeure sombre et d’actualité. Les hommes sont toujours éliminés sans aucune considération. Les mensonges en politique restent monnaie courante. Décidément, le sceptre d’Ottokar ne manque pas de cachet.

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