A l'image de sa couverture très sombre, un bouquin dont chaque chapitre vibre de douleur et de désespoir.
Heureusement il n'y a qu'à peine plus de 100 pages et c'est bien assez comme ça : on est content de refermer cette douloureuse histoire, en se disant bien vite ouf, ce n'est qu'un roman, la vraie vie ne peut pas être aussi terrible que ça, etc.
Mais le hic, c'est que c'est très très bien écrit et que l'on se croit donc obligé d'en parler à d'autres qui vont, à leur tour, découvrir ces sombres pages et l'histoire d'un couple détruit, brisé par la perte incommensurable de l'enfant.
Bien plus que leur couple, c'est chacun d'eux, elle et lui qui sont ainsi détruits et brisés (le roman est à deux voix).
Tout cela sur un ton très juste, sans mélo ni trémolos (il n'est que très peu question de la fillette perdue) et c'est là toute la force de l'écriture de Laurence Tardieu que de nous faire partager la douleur indicible de ses deux personnages.
Le roman débute lorsque Vincent (lui) apprend la mort imminente de Geneviève (elle), quinze ans après la disparition de leur petite fille et leur séparation qui s'en suivit.
[...] J'essaie de me dire que tu es en train de mourir mais je n'arrive pas à comprendre ce que cela signifie. Je n'y arrive pas. Je prononce la phrase doucement comme un enfant répétant les mots d'un autre : Geneviève est en train de mourir. Mais ça ne veut rien dire. Ça n'a aucun sens.
[...] Nous allons nous faire du mal Geneviève. Pourquoi nous faire du mal si bientôt tu n'es plus là, pourquoi remuer la souffrance en nous ? Ne vaudrait-il pas mieux laisser tout cela reposer en paix ? Il me semble que lorsqu'on sent la nuit venir, on aspire à l'ordre et non au désordre. Le temps n'est plus à la quête.
Leurs retrouvailles (trop) tardives vont faire ressurgir le terrible passé ...
[...] Certains êtres, à mesure que le temps passe, deviennent de plus en plus libres : ils se redressent au lieu de s'affaisser. Il émane d'eux une énergie étonnante. Ils sont lumière pour qui les rencontre. J'aimerais savoir ce qu'ils ont fait des ombres de leur passé. De leurs regrets, de leurs déchirures. Comment ils s'en sont arrangés.
Geneviève (elle) tient un journal et il y est donc également question de la fonction salutaire de l'écriture :
[...] Je ne savais pas que les mots peuvent sauver. Aujourd'hui je le sais : ils maintiennent le lien à soi. Ils permettent de ne pas s'égarer dans la nuit profonde de la folie. [...] Ecrire ce soir m'a permis de finir la journée dignement : sans tomber, sans céder à la tentation d'en finir. Cete fois encore, l'écriture m'a sauvée. [...] Si je m'arrêtais d'écrire je crois que je mourrais. Seuls les mots me maintiennent en vie.
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