[Le voyage de Marcel Grob | Philippe Collin ; Sébastien Goethals]
SS malgré lui.
On n’est pas pris au sérieux quand on a dix-sept ans et qu’on est Alsacien en juin 1944, au tournant de la Seconde Guerre mondiale. Les Allemands sentent l’étau se resserrer, entre l’enclume des Américains et le marteau des Russes. Ils ont absolument besoin de nouveaux combattants et l’Alsace dispose encore d’une jeunesse germanophone qu’il est possible d’enrôler de force. Marcel Grob intègre la Waffen SS à son corps défendant. S’il refuse, sa famille paiera le prix fort. Il se trouve embarqué dans une histoire qui le dépasse, un voyage qui le dépossède. Les opérations militaires menées dans le nord de l’Italie contre les partisans et les civils italiens l’entraînent vers l’horreur.
Le 11 octobre 2009, sous une lampe qui pourrait être tenue par un tortionnaire de la gestapo, Marcel Grob doit répondre devant un juge de ses actes passés, plus de soixante ans après les faits. Grob tente de se justifier mais n’est-il pas, au bout du compte, confronté à son jugement dernier, à une pesée des âmes en son for intérieur ?
La biographie dessinée de Marcel Grob bénéficie d’une remarquable construction narrative. L’entrée en matière joue parfaitement sur l’ambiguïté. Se trouve-t-on dans une salle d’interrogatoire ou dans une salle d’hôpital ? La lampe suspendue rappelle celle braquée par les nazis sur les visages des suppliciés. Les questions du juge fouillent méthodiquement le passé de Grob. Le lecteur ne sait pas à qui il a à faire. Il avance avec circonspection sur un terrain fangeux et miné. Puis le passé se précise et se nuance en sépia. Si le scénario est solide, le dessin est plus fragile, presque cassant au présent. Il reprend matière et densité dans l’évocation du passé de Grob qui constitue l’essentiel du voyage au bout de la nuit.
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