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[Discriminations : combattre la glottophobie | Philippe ...]
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Posté: Mar 21 Déc 2021 0:03
MessageSujet du message: [Discriminations : combattre la glottophobie | Philippe ...]
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[Discriminations : combattre la glottophobie | Philippe Blanchet]

En France, tout a commencé sans doute par l'illustre figure révolutionnaire de l'abbé Grégoire, panthéonisé en 1989, « artisan de l'émancipation des Juifs et de l'abolition de l'esclavage », mais aussi auteur d'un célèbre Rapport sur la Nécessité et les Moyens d'anéantir les Patois et d'universaliser l'Usage de la Langue française (1794). De là, et d'une utilisation sous la IIIe République des instruments d'un colonialisme d'abord national, en province et dans les campagnes, pour éradiquer les parlers locaux et standardiser le français dans le dessein d'en faire un outil glottopolitique de l'État-nation indivisible. Contrairement aux textes législatifs internationaux et notamment européens relatifs aux Droits humains qui incluent opportunément les discriminations linguistiques aux autres formes de discriminations à proscrire, la France refoule l'idée même qu'un tel phénomène existe, et ainsi elle promeut une idéologie hégémonique de hiérarchisation linguistique sous forme de glottophobie/glottophilie, selon le mécanisme de la domination et de la stigmatisation propre à toutes les autres formes de discriminations. Ces discriminations sont des formes d'exclusion sociopolitiques qui opèrent par une sacralisation des processus de standardisation, de l'écrit comme de l'oral, qui passe par le truchement de l'école. En même temps, un examen plus approfondi des pratiques glottophobes, aussi bien institutionnelles qu'individuelles, nous convainc à la fois de l'abominable diffusion de la glottophobie, et de sa métamorphose progressive d'un contexte du mépris social et régional (pourtant persistant) au mépris du plurilinguisme des migrants et des personnes d'origines étrangères. L'approche du livre est donc clairement sociolinguistique, mais parfois émergent en filigrane d'intéressantes réflexions plus purement linguistiques : par ex. sur la primauté de la pratique langagière dans l'élaboration de la norme grammaticale, sur la réfutation de la notion de « maîtrise de la langue » et de celle du mythe du « locuteur monolingue ». La dernière partie du volume se concentre sur une pars construens consistant à donner des pistes pour combattre la glottophobie, notamment dans une articulation entre court, moyen et long terme.



Table :

Partie I : Les pratiques linguistiques, un domaine de discrimination largement ignoré :
1. Une absence dans les textes juridiques français.
2. Une certaine négligence dans les travaux érudits sur les discriminations.
3. Une présence inégalement condamnée dans les grands textes internationaux relatifs aux Droits humains.
4. Une pratique massive d'après les observateurs des dynamiques sociales et linguistiques.
5. Objectifs de ce livre.
6. Remerciements.

Partie II : Voir les choses autrement :
1. Les pratiques linguistiques sont des pratiques sociales.
2. Les langues sont des moyens et des enjeux de domination et de pouvoir.
3. Pratiques spontanées et normes prescrites.
4. Les discriminations linguistiques sont des discriminations.
5. Glottophobie : un terme pour insister sur les dimensions humaines et sociales des discriminations linguistiques.
6. Le cercle vicieux de la minoration et de la majoration sociolinguistiques ou le trio infernal glottophobie, glottophilie, glottomanie.
7. L'hégémonie impose la croyance dans une idéologie.
8. Diversité linguistique et communication.
9. La communication linguistique et le mythe de la maîtrise de la langue commune.

Partie III : Comment s'est déployée et se maintient la glottophobie ?:
1. Les rôles des agents et des instances glottopolitiques dans la diffusion de la glottophobie.
2. Désocialisation et déshumanisation des "langues" : la responsabilité des grammairiens et des linguistes.
3. Contrôle linguistique et contrôle social.
4. Standardisation, diglossie et insécurité linguistique.
5. Enseignement, insécurité linguistique et glottophobie.
6. L'élaboration des langues standard comme procédé d'exclusion sociopolitique.
7. Quand les dominés veulent devenir dominants à la place des dominants.

Partie IV : La glottophobie en pratique : étude d'exemples :
1. Discours et comportements glottophobes.
2. Exemples de glottophobie institutionnelle.
3. Exemples de glottophobie institutionnelle et individuelle.
4. Exemples de glottophobie individuelle.

Partie V : Des pistes et des principes pour combattre la glottophobie :
1. Réaffirmer le caractère profondément humain, social et culturel des "langues".
2. Demande sociale et mise en œuvre d'une glottopolitique autogestionnaire de la pluralité.
3. Repenser l'éducation linguistique et les aspects linguistiques de l'éducation.
4. Commencer par une pratique personnelle consciente et vigilante.
5. Réinsérer la question linguistique dans un projet de société.


Cit. :


1. « Il s'agit, dans ce cas, de norme(s) élaborée(s) et prescrite(s) par des instances décisionnelles. individuelles ou collectives, de façon consciente et volontaire, par rapport aux pratiques spontanées identifiées comme relevant de la langue concernée. Le but est de construire une variété standard la plus homogène possible […]. On parle alors de règles prescriptives. Ces règles prescriptives relèvent de motivations d'ordre social, idéologique, politique. Elles dépendent avant tout de choix d'organisation de la société et servent des enjeux de pouvoir, de domination sociale, économique, culturelle, ethnique, etc. à laquelle contribue une domination linguistique. Parce qu'elles prescrivent certaines formes linguistiques et en proscrivent d'autres, elles produisent l'exclusion d'une partie souvent majoritaire d'une population par et pour la domination d'une autre partie, souvent minoritaire, des membres de la même société […]. […] Divers organismes et institutions (notamment l'école) inculquent la croyance :
- que les langues préexistent à leurs usages et que leurs locuteurs doivent les mettre en œuvre en en respectant les "règles" prescrites ;
- que seules les langues standardisées sont légitimes (au point même de faire parfois l'objet de prescriptions par la loi) ;
- que les langues qui n'ont pas de grammaire prescriptive n'ont pas de grammaire du tout (ignorant ainsi l'existence des règles constitutives), ne sont donc pas de "vraies" langues, sont des "non langues" (d'où les notions péjoratives de "dialecte" et de "patois" pour les désigner) ;
- que la plupart des variations sont des "fautes" par rapport à cette norme prescrite. » (pp. 38-39)

2. « Cet échec [l'échec scolaire] est surtout celui de l'école, incapable d'accomplir sa mission par enfermement dans une idéologie uniformisatrice dont l'idéologie linguistique n'est qu'une des facettes. Il en résulte non seulement de l'incompréhension mutuelle réelle (ou feinte, de la part des enseignants) entre apprenants et enseignants, mais aussi de l'insécurité linguistique chez les élèves dont les productions langagières sont stigmatisées, avec son corollaire connu d'humiliation, de perte d'estime de soi, de mutisme électif, de désinvestissement voire de sentiment d'injustice, d'indignation et de révolte, dont la "violence verbale" des élèves est perçue comme telle par les enseignants (on a montré qu'elle est souvent une réponse à la violence symbolique, culturelle et verbale que l'institution scolaire et ses représentants exercent contre les élèves notamment ceux qui sont hors des normes standards dominantes de l'école […]). » (p. 88)

3. « En ce qui concerne le droit au séjour de moyenne ou longue durée en France (au-delà d'un court séjour touristique ou professionnel), la législation française actuelle fait fonctionner dans la plupart des cas un système de discrimination linguistique. Les lois de 2005 sur la "cohésion sociale", de 2006 sur le "contrat d'accueil et d'intégration" et de 2007 sur "la maîtrise de l'immigration, l'intégration et l'asile", les circulaires de 2006 et 2012 sur la régularisation de droit au séjour des parents d'enfants scolarisés en France, posent toutes un critère de "connaissance" ou de "maîtrise" de la langue française. Ainsi, alors que par ailleurs la loi française impose aux couples mariés d'avoir une vie commune, les conjoints étrangers de Français ou d'étrangers/-ères résidant en France ne peuvent obtenir de visa ou de carte de résidant pour accompagner ou rejoindre leur conjoint et pour vivre en France avec leur conjoint et/ou leurs enfants qu'à condition de faire preuve d'une connaissance suffisante de langue française comme garantie supposée de leur intégration effective ou potentielle dans la société française. » (pp. 117-118)

4. « Si l'on pose, en effet, que l'immense majorité des humains et des sociétés est plurilingue, qu'une compétence linguistique est normalement plurilingue, et qu'une compétence plurilingue n'est pas la juxtaposition de monolinguismes étanches mais un ensemble intégré de ressources plurielles utilisables de façon métissée par stratégie ou par covariance, alors le monolingue natif (si tant est qu'il en existe vraiment) n'est plus le modèle absolu de compétence linguistique. Cela se double de la croyance archaïque en un apprentissage "inné" quasi biologique de la 1re langue (dite "native" ou "maternelle" pour cette raison), censée être toujours dominante chez l'individu. » (p. 170)

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