Cinq semaines au ballon.
La collaboration française avec l’Allemagne nazie entre 1940 et 1944 se situe au niveau étatique (aide économique, financière, policière, militaire et culturelle) et au stade individuel (dénonciation, ententes cordiales ou amoureuses, commandes et sollicitations diverses faites aux Allemands).
En 1942, à Paris, l’inspecteur Léon Sadorski travaille aux Renseignements généraux et se spécialise dans le contrôle et l’arrestation des Juifs. Fortement investi dans un travail peu rémunéré mais complété par des extorsions diverses et autres abus sexuels, Sadorski se voit gravir les marches de la puissance, de la reconnaissance et de la jouissance jusqu’à ce que la Gestapo vienne le cueillir pour l’emmener à Berlin, jusqu’à son siège, au 8 Prinz-Albrecht-Straße afin de le cuisiner sur ses prétendues activités de surveillance. Cinq semaines durant, l’inspecteur français va subir la prison et la peur d’être éliminé sans autre forme de procès. Pourtant, les Allemands décèlent vite en Sadorski un collaborateur zélé, efficace et sans scrupule qu’ils vont pouvoir utiliser à bon escient.
Du passé glauque de la Collaboration en France, les manuels d’histoire éludent et amoindrissent la portée d’un vaste consentement intéressé nourri de veulerie et de lâchetés, entretenant un système délétère et létal. En apportant de la consistance à cette inquiétante période, Romain Slocombe remue le couteau dans le bide de la bien-pensance et amène sur un plateau aux esprits d’aujourd’hui toute une brochette de gens quelconques que les circonstances favorisent ou détruisent, le mal n’étant pas l’apanage des élites, sa force terrifiante percolant aussi les consciences ordinaires. Léon Sadorski, double fictionnel quasi homonyme du sinistre brigadier-chef aux Renseignements Généraux Louis Sadosky (1899-1967), fait revivre un salaud que le système cautionne, petit fonctionnaire, arriviste et banal, quêtant l’assentiment des chefs, écrasant les assujettis. L’excellent roman historique met à jour toute une mafia opportuniste et les réseaux du pouvoir de l’époque facilement transposables de nos jours.
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