Il était une fois dans le sud-ouest.
Le pas du gars de la ville n’est pas le même que celui du montagnard. Cela n’empêche pas le Parisien d’avoir son passage dans l’échine sommitale des Pyrénées ariégeoises : « un passage qu’il ne faut pas manquer : c’est le seul, ailleurs, tout est droit, sans prise, sans rien, juste quelques broussailles qui cachent le vide ». Outre le narrateur, il y a les amis, Barthes, Manole, Georges guidant aux aurores deux touristes vers les lacs d’altitude pour la pêche à la truite. A l’approche d’un orri encore entretenu et connu des gens du cru, vieil abri d’estive en pierres sèches, deux jeunes en surgissent, épaulent et abattent les deux pêcheurs, atteignant aussi Barthes en pleine poitrine. Les tueurs prennent la tangente et s’échappent, non identifiables dans les lointains hormis le fait qu’il s’agirait de deux femmes. Quels sont les raisons de la tuerie ? Acte prémédité, coup de folie meurtrière ? Si l’exécution a été mûrie en amont, qui sont les deux touristes, Barthes constituant alors probablement une victime collatérale ?
Michel-Julien Naudy fréquente certainement la montagne pyrénéenne et l’évoque en connaisseur. Son narrateur est salarié EDF sur un barrage. L’auteur se range du côté des petites gens où l’entraide joue indépendamment d’un pouvoir étatique trop lointain pour être efficace et crédible. Quand un problème surgit, il faut le résoudre avec les moyens du bord. Si la narration éclatée et digressive peut déconcerter très légèrement dès l’entame du roman, le style fluide et vivant accroche immédiatement l’intérêt. Le lecteur sent la montagne vibrer dans les descriptions pourtant lapidaires mais parfaitement ancrées sur des détails parlants. Les chapitres brefs dessinent progressivement les contours d’une pâte humaine à laquelle le lecteur ne peut qu’adhérer. Le puzzle finit par s’assembler et un tir aux pigeons final clôt un mountain movie de belle facture.
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