[Un sombre pressentiment : à la rencontre de Hieronymus Bosch | Cees Nooteboom]
L’homme invisible
La commémoration du 500e anniversaire de la mort du peintre flamand Jheronimus van Aken, nom francisé en Jérôme Bosch (1450-1516), entraîne l’écrivain néerlandais Cornelis « Cees » Johannes Jacobus Maria Nooteboom (né en 1933) dans un périple urbain (Madrid, Lisbonne, Gand, Madrid) où sont conservées quelques œuvres majeures du maître de Bois-le-Duc : La Tentation de saint Antoine (1500-1510), Musée Arte Antiga, Lisbonne ; Le Jardin des délices (1490-1510), Musée du Prado, Madrid ; L’Adoration des Mages (1493-1499), Philadelphia Museum of Art, Philadelphie ; Saint Jérôme en prière (1505), Musée des Beaux-Arts, Gand ; Le Portement de croix (1515-1516), Musée des Beaux-Arts, Gand ; Le Chariot de foin (1500-1502), Musée du Prado, Madrid ; Saint Christophe (1490-1500), Musée Boijmans Van Beuningen, Rotterdam.
L’essai de Cees Nooteboom débute en considérant la qualité et la pertinence des souvenirs dans le temps et retient immédiatement l’attention du lecteur : « […] nous déformons nos souvenirs, nous les distendons, nous mentons sans le savoir, falsifions ce que nous prenons pour notre mémoire, nous écrivons une vérité qui n’a jamais existé et nous l’emportons avec nous pour le reste de notre vie ». Le regard porté sur une œuvre des décennies plus tard n’est plus le même mais est-ce si important à défaut d’être évident ? Il manquera toujours au spectateur de l’œuvre une grille de déchiffrement car Bosch n’a laissé aucune trace écrite. Seuls demeurent des tableaux énigmatiques sur lesquels les exégètes ergotent. A la lecture de Nooteboom, on peut penser à la phrase d’Arthur Rimbaud au sujet de ses hermétiques « Illuminations » (1873-1875) sur lesquelles la glose abonde : « J’ai seul la clé de cette parade sauvage ». L’écrivain néerlandais n’apporte aucun éclairage neuf sur Jérôme Bosch. Enumérer les détails qui fourmillent dans les tableaux ne suffit pas à rendre compte du sens de l’œuvre d’autant que les reproductions en regard ne correspondent pas aux propos de l’auteur. L’ensemble se lit pourtant agréablement et rapidement mais l’essai demeure anecdotique. La comparaison finale entre la peinture de saint Christophe portant l’enfant Jésus et la photographie récente montrant un policier turc s’inclinant sous le poids d’un enfant syrien mort paraît fortuite. La bibliographie dresse une courte liste d’ouvrages en allemand, néerlandais, anglais, espagnol. L’auteur est polyglotte et peut s’abreuver aux meilleures sources.
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