Un certain nombre d'aspects inscrivent ce deuxième roman policier de l'auteur turc Alper Canigüz dans la continuité avec le précédent,
L'assassinat d'Hicabi Bey, avec cependant des éléments de complexification qui contribuent à me le faire juger plus mature et accompli.
Dans la continuité, nous retrouvons le héros, Alper Kamu (référence à Albert Camus, suggérée pas assonance), qui a toujours cinq ans, les mêmes caractéristiques intellectuelles et caractérielles, les mêmes moments de spleen et questionnements adultes notamment sur ses rapports à l'autre sexe... Les petits chenapans du quartier populaire continuent d'avoir une part importante dans le récits, de par leurs relations avec Alper et leur « guerre des boutons » entre eux. Les deux représentants de la justice, le commissaire adjoint Onur Çalışkan et le procureur Metin Bilgin ont aussi un rôle (encore plus) fondamental dans la fabula. Enfin, l'on retrouve aussi une histoire dans l'histoire, de nature fantastique et métaphysique encore, écrite et italiques, sous la forme, cette fois, non d'une hallucination par auto-intoxication mais d'une fable contée par le père du petit garçon.
Parmi les éléments de complexification, nous sommes confrontés dès le début du récit à deux décès : celui, pour cause naturelle, de l'oncle paternel d'Alper, et celui, par meurtre – en fait, un assassinat – d'un enfant du voisinage de notre petit détective. Le meurtrier avoué, frère de la victime et environ du même âge qu'Alper, s'avérera ne pas l'être, grâce à l'enquête de celui-ci qui, cependant, pour avoir révélé sa découverte à l'assassin avant qu'à la police, se mettra en danger de vie, d'où un long chapitre trépidant de suspense... qui n'est pas la chute du roman, laquelle, beaucoup plus intimiste et psychologique, concernera l'autre décès.
Outre l'imbrication de ces deux histoires de mort, le lien de parenté du défunt adulte avec le petit détective affecte beaucoup ses parents, et lui permet de voir clair dans les causes de leurs rapports si tendus, déprimés et névrotiques – que nous n'avions qu'aperçus avec le sourire dans l'opus précédent. Dans ce roman-ci, les parents sont donc des personnages d'une épaisseur psychologique significative, grâce à leur passé et aux secrets de famille, et Alper est confronté aux relations conjugales adultes dans le plus cru et douloureux questionnement sur ses propres origines et sa place auprès du couple parental. Par conséquent, le personnage d'Alper gagne aussi en profondeur, et ses comportements dépressifs ne sont plus qu'uniquement anecdotiques.
Le style est sensiblement identique à celui que nous connaissons déjà, alternant les registres de langue et jouant constamment sur le décalage entre l'âge mental d'Alper et son quotidien ainsi que son imagination foisonnante de petit garçon.
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