[Comment on raconte l'histoire aux enfants à travers le monde entier | Ferro Marc]
Comment on raconte l'histoire aux enfants à travers le monde entier / Ferro Marc. – Paris : Payot, 1986 (copyright 1981), 316 p. – Coll. Prismes, n° 3. – ISBN 2-228-80030-9
Dire comment on raconte l'histoire aux enfants « dans le monde entier » est une vaste entreprise pour un unique auteur. Mais la première de couverture précise qu'il s'agit d'un essai, et des remerciements sont adressés à de nombreux amis ou étudiants qui ont bien voulu procurer des livres à Marc Ferro, et même les traduire, parfois corriger ou relire certains chapitres.
C'est ainsi que nous sont présentés :
L'histoire « blanche » : Johannesbourg
L'histoire décolonisée : l'Afrique Noire
Note de lecture sur une variante : à Trinidad, la réaction exorciste
Aux Indes, l'histoire sans identité
Histoire de l'Islam ou histoire des Arabes
Variante persane (et turque)
Du Christ-Roi à la patrie et à l'Etat : l'histoire vue d'Europe (Espagne, Allemagne nazie, France)
Visages et variations de l'histoire en U.R.S.S.
L'histoire, sauvegarde de l'identité nationale en Arménie
L'histoire vue de profil : la Pologne
Note sur les incertitudes de l'histoire en Chine
L'histoire au Japon : un code ou une idéologie ?
L'histoire « blanche » en déconstruction : les Etats-Unis
Note et lecture sur l'histoire « interdite »: Mexicains-Américains, Aborigènes d'Australie
Pour Marc Ferro, « l'image que nous avons des autres peuples, et de nous-mêmes, est associée à l'Histoire qu'on nous a racontée quand nous étions enfants. Elle nous marque pour l'existence entière ». Racontée, écrit-il, non pas seulement enseignée. Car il note : « pour chaque nation ou presque, se superposent ou se confrontent aujourd'hui plusieurs histoires : en Pologne, par exemple, celle que l'on présente à l'école diffère sensiblement de celle qui est racontée à la maison. Les Russes n'y jouent pas exactement les mêmes rôles... »
Pour l'auteur, « indépendamment de sa vocation scientifique, l'histoire exerce en effet une double fonction, thérapeutique et militante […] L'histoire enseignée aux petits Africains nous en apprend autant sur les problèmes actuels du continent noir que sur son passé. Les livres pour enfants y sont portés à glorifier les grands empires du passé africain, dont la splendeur est mise en parallèle avec le retard et la déchéance de l'Europe féodale, à la même époque : la fonction thérapeutique est clairement exprimée […] Pour l'histoire ʺmilitante ʺ, on pense d'abord naturellement aux manipulations pratiquées en U.R.S.S. […] Mais, aux Etats-Unis, l'évolution de l'enseignement est encore plus radicale : elle exprime le passage de l'idéologie du melting-pot (l'Amérique ʺcreusetʺ des peuples) à celle du salad-bowl (variée), où les cultures gardent leur identité ».
Le travail de Marc Ferro est une mise en question de la conception traditionnelle, téléologique et ethnocentrique, de l' « histoire universelle ». Dans sa conclusion, il rend hommage aux fondateurs de l'Ecole des Annales, Bloch, Febvre, et encore plus à Fernand Braudel « qui a compris la double nécessité de connaître l'histoire et de la reconstituer sur de nouvelles bases, expérimentales celles-là. Nous avons rencontré des praticiens de cette histoire expérimentale […] Partielle, segmentaire, cette histoire-là ne saurait encore prétendre à une explication universelle de tout le développement des sociétés. Elle se veut globale, voire totale, mais pas totalitaire. Ces praticiens portent en eux l'avenir d'une histoire nouvelle ».
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