Quand Finlay Macleod est convoqué par son supérieur Black, il sait qu’une reprise de son activité de policier sera salutaire après la mort de son fils unique. Il fuit sa femme Mona, le fantôme de son enfant et part pour Lewis, son île natale, à l’extrême nord des Hébrides, au large de l’Ecosse parce qu’un meurtre vient d’être commis selon un modus operandi similaire au crime commis à Edimbourg sur lequel il a travaillé. Ange Macritchie, un rustaud brutal, détesté des insulaires a été tué et pendu. Si Fin semble tout désigné, son arrivée à Lewis n’est pas du goût de l’inspecteur principal Tom Smith chargé de l’enquête, dédaigneux des autochtones, des Gaéliques barbares. Relégué à des tâches subalternes avec George Gunn, un autre collègue natif de Lewis, Finlay assiste à l’autopsie de la victime, interroge les témoins. Plus qu’une investigation dans le présent, Finlay laisse émerger ses souvenirs qui prennent corps dans le récit comme des volutes de brume qu’un éclair de soleil transperce. Les réminiscences de Finlay s’accordent au tempo de l’enquête, lentes, denses, obsédantes. Elles donnent de la chair à l’enquête du policier revenu sur des terres de mémoire qu’il a fuies, corps et âme, depuis dix-sept ans. Finlay a plus d’un compte à rendre à lui-même. A mesure que les faits marquants de son enfance s’inscrivent dans le récit, les protagonistes acquièrent une densité parfois stupéfiante. Le roman culmine avec la chasse aux « gugas », les poussins des fous de Bassan, sur l’ilot désolé d’An Sgeir. Finlay Macleod va être confronté à tout un pan de sa mémoire qu’il avait occulté. La souffrance sera au rendez-vous mais une lucarne semble s’ouvrir au-dessus des abysses où les vies s’engloutissent.
Peter May a écrit un roman prenant dans lequel l’histoire sociale constitue la pâte et les relations humaines le levain. L’enquête policière n’est qu’un prétexte à une descente dans le cœur des hommes, les faits qui les construisent ou les émiettent, parfois les anéantissent. Les descriptions des paysages sont précises et posent un décor dont le rôle souterrain n’en demeure pas moins essentiel. Le style est sobre et fluide. Après ce premier opus réussi, le lecteur peut avoir envie de poursuivre la trilogie de Lewis.
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