Que ressent-on lorsque nous sommes condamnés à mort ? à quoi pense t-on dans sa cellule ? quels moyens inventerions-nous pour "tenir", physiquement et psychologiquement ? Le grand Arthur Koestler s'est trouvé confronté à ces questions en janvier 1937 quand il fut arrêté par les nationalistes de Franco et condamné à mort pour "espionnage".
Envoyé en Espagne par son journal le "News chronicle", son grand tort aux yeux des nationalistes est d'avoir déjà publié en Grande-Bretagne un livre au vitriol sur les enjeux de la guerre civile espagnole, égratignant au passage le général Queipo de Llano, reître sanglant et passablement ridicule qui officiait alors à Séville.
Récit à la fois sobre et émouvant. Koestler se veut d'une précision entomologique. Chaque détail à son importance. Les petits riens d'une journée de condamné à mort : un morceau de savon trouvé dans la douche ; le bibliothécaire de la prison qui lui apporte , ô ironie, "Voyage autour de ma chambre" de X. de Maîstre, mais en espagnol...le sourire d'un gardien, un mégot trouvé dans la cour....Et puis ce refrain terrible que nous asséne Koestler: " -Du mardi au mercredi, on en fusilla dix-sept.
-Du jeudi au vendredi, on en fusilla huit.
-Du vendredi au samedi, on en fusilla neuf.
-Du samedi au dimanche, on en fusilla treize.
Je déchirai des petits lambeaux de ma chemise que je mis en tampon dans mes oreilles pour ne rien entendre la nuit. En vain. Je me fis des coupures dans les gencives avec l'éclat de verre et prétendis souffrir d'hémorragies pour obtenir de l'ouate iodée. Je me la fourrai dans les oreilles. Cela non plus ne servit à rien. "
Arthur Koestler était malgré tout un privilégié (il le reconnait volontiers). Il fut échangé au bout de deux mois avec la femme d'un as de l'aviation nationaliste retenue par les républicains.
----
[Recherchez la page de l'auteur de ce livre sur
Wikipedia]
Afficher toutes les notes de lectures pour ce livre