A l’écoute des voix du monde perçues de prime abord depuis le village bourguignon de Sacy, l’écrivain et poète Jacques Lacarrière élargit son attention à l’environnement immédiat avant de voguer vers l’Egypte, les déserts et revenir à l’espace intérieur, au visage, aux mains. A travers ses sourates (de l’arabe « sura » signifiant « verset » ou « chapitre »), l’auteur, « géographe des brindilles », déploie une spiritualité toute personnelle, révélatrice d’une qualité d’écoute puisant aux sources les plus délicates du monde car « dans l’abîme du minuscule réside aussi le mystère des voix ». L’auteur arrive à faire décoller son propos dès qu’il s’y met en scène, nouant ses souvenirs à ses réflexions, ancrant sa rhétorique dans son vécu à l’exemple de La sourate des Bogomiles relatant l’« hérésie » cathare et bogomile [appelés les Purs en Occitanie et les Amis de Dieu en Bosnie et en Herzégovine] : « […] ces Amis de Dieu constituèrent pendant le Moyen Âge des communautés rurales importantes, rivées à ces terres difficiles, apparemment isolées du monde et ouvertes cependant aux messages gnostiques et libertaires venus d’Anatolie, de Cappadoce et des communautés d’Egypte. » D’une sourate l’autre, le lien se fait par la reprise de la dernière phrase ouvrant un nouveau chapitre, continuant une pensée vagabonde, butant sur l’Egypte, s’insinuant dans l’herbe de la colline de Sacy, une réflexion ourdie de poésie, usant de la litanie comme d’un encensoir pour mieux révéler à la conscience du lecteur la lumière d’une phrase ciselée, riche et concise. La sourate dernière ou la sourate du silence, réduite à une expression simple, presque lapidaire, a des accents testamentaires.
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