Voici l'un des meilleurs romans de Dick que j'aie lu. L'histoire est formidable, les enjeux complexes mais globalement clairs, les personnages nombreux et torturés et contrairement à pas mal de romans de Dick, la fin n'est pas bâclée.
La vérité avant-dernière est un must read pour les fans du jeu Fallout dont il décrit l'univers avec précision (je me dis d'ailleurs depuis longtemps que Fallout est directement inspiré de l'oeuvre de Dick sans arriver à trouver le roman pierre angulaire : c'est désormais chose faite).
Voici le pitch : nous sommes en 2025, il y a quinze ans, la guerre froide entre les blocs Est et Ouest a dégénéré en guerre atomique et les dirigeants avisés ont parqué les terriens dans des abris sous-terrains. Ceux-ci sont fréquemment informés de la progression du conflit par leur président, Yancy, qui organise des allocutions télévisées très sarkoziennes dans lesquels il les félicite pour leur abnégation et leur demande de contribuer à l'effort de guerre en fabriquant toujours plus d'androïdes de combat.
Sauf que, en réalité, une fois les dirigeants débarrassés des masses laborieuses et après que quelques bombinettes aient rasé la plupart des villes et des labos de recherche, les dirigeants ont signé un traité de paix et se sont partagé la planète. Régnant sur des domaines féodaux immenses, ils utilisent les robots fabriqués par les habitants des abris comment main d'oeuvre et les abreuvent de mensonges télévisés pour les inciter à demeurer sous terre car ils sont persuadés que ce qui provoque les guerre, c'est le peuple...
Yancy est une marionnette animée par un ordinateur géant qui recrache les discours fabriqués par une armée de rédacteurs et commente des films fabriqués de toute pièce en studio par des réalisateurs de génie, payés pour faire plier la population aux desiderata d'une oligarchie de happy few qui entendent le rester (few).
Hélas, comme les labos ont été détruits et que les scientifiques sont soit morts, soit dans les abris, la civilisation utilise une technologie qu'elle ne comprend pas et régresse peu à peu. Il faut aussi parquer dans des cités-dortoir-prison les habitants des abris qui décident quand même de remonter à la surface.
Le roman démarre là, et décrit un point de rupture dans le continuum, quand un messie venu du fonds des âges décide de briser l'omerta...toute la question est de savoir s'il y parviendra, et quelles sont ses motivations.
Comble du raffinement, Dick donne au simulacre un fondement historique en décrivant une série de films tournés dans les années 80 pour réhabiliter l'Allemagne et remettre en question les certitudes des terriens sur les causes, le déroulement et les conséquences de la seconde guerre mondiale.
C'est du très grand Dick où sont exploitées toutes les préoccupations de l'auteur sur le secret, le simulacre, le travestissement de la vérité et sur le sens de la vérité : toutes les vérités sont-elles bonnes à dire? Vaut-il mieux vivre heureux et trompé ou triste et averti? ...bref, çà va loin.
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