Quoi qu'il puisse arriver, Jonas, peintre au talent reconnu, croit en sa bonne étoile — jamais elle ne cessera de l'aider et de le guider. Pourtant la vie, ses proches, ses amis, ses disciples l'acculent peu à peu à la stérilité artistique…
Cette nouvelle, éponyme, et celle qui m'a le plus séduite. Elle est décalée, ce qui correspond à l'image (peut-être tout à fait fausse?) que je me fais de Camus, moi qui n'ai lu qu'un seul de ses romans jusqu'à présent.
Cet humour fin et mordant est présent dès les premières lignes :
"Gilbert Jonas, artiste peintre, croyait en son étoile. Il ne croyait d'ailleurs qu'en elle, bien qu'il se sentît du respect, et même une sorte d'admiration devant la religion des autres. Sa propre foi, pourtant, n'étant pas sans vertus, puisqu'elle consistait à admettre, de façon obscure, qu'il obtiendrait beaucoup sans jamais rien mériter".
C'est particulier, mais moi je suis très fan de cet humour "l'air de rien"!
Outre ce ton plaisant, la nouvelle présente aussi de nombreux passages dénonciateurs, là encore avec détachement, ce qui accroît l'effet, évidemment! Ces petites pointes qui font mouche touchent essentiellement à l'art, thème de la nouvelle. Ainsi ces petits passages franchement criants de vérité et toujours d'actualité :
"[...] un disciplie n'était pas forcément quelqu'un qui aspire à apprendre quelque chose. Plus souvent, au contraire, on se faisait disciple pour le plaisir désintéressé d'enseigner son maître [...]. Jonas découvrit ainsi dans son oeuvre beaucoup d'intentions qui le surprenaient un peu, et une foule de choses qu'il n'y avait pas mises".
"Il comprit rapidement que ses disciples ne lui demandaient pas des critiques, dont ils n'avaient que faire, mais seulement des encouragements et, s'il le pouvait, des éloges".
Mais on ne s'y trompe pas, cette légèreté n'est qu'apparente, et la solitude prend le pas. C'est le coeur désespéré et désabusé qu'on termine la lecture de cette nouvelle. C'est caractéristique de Camus, non?
Un ingénieur français, en mission au Brésil, est confronté aux superstitions et au mysticisme des indigènes. Mais l'amitié qu'il éprouve pour l'un d'entre eux aura raison de son scepticisme.
Cette seconde nouvelle, La pierre qui pousse, nous plonge au coeur d'un monde superstitieux, constuit autour de rituels et de croyances qui déroutent l'ingénieur français. Elle m'a moins séduite ; à aucun moment je ne suis réellement parvenue à me sentir accrochée à l'histoire... Mais c'est un ressenti fréquent chez moi lorsque je lis des nouvelles, genre que je trouve assez frustrant!
Au final, je retiendrai la nouvelle de Jonas ou l'artiste au travail, qui m'a semblée particulièrement réussie : un univers particulier, une apparente légèreté qui cache un profond désespoir... Elle ouvre à la réflexion, notamment sur le sens des choses et de nos vies.
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