Je m'attaque régulièrement à des monuments de la littérature mondiale, quitte à y passer du temps pour en apprécier les finesses, en assimiler les enjeux... Ce fut le cas l'année dernière pour
Le Rouge et le Noir,
Le Comte de Monte Cristo... Les frères Karamazov, c'est tout de même un sacré morceau et je voulais profiter de mes dernières semaines en région parisienne avec mes 2h de transports quotidiens pour avaler ses presque 1000 pages.
On peut vraiment parler de monument de la littérature mondiale en raison de l'écriture, de la profondeur de la réflexion et de l'histoire en elle-même.
Toute traduction altère nécessairement le texte en opérant des choix. Elle est dépendante du traducteur, qui est en quelque sorte un nouvel auteur, et de sa proximité à l'auteur, au texte. Elle est liée aussi à l'époque de rédaction du texte et à celle de la traduction. Cepandant, si la matière première elle-même est de piètre qualité, tout bon traducteur ne peut en faire un joyau littéraire. Dans le cas présent, le traducteur est contemporain du texte. Il apporte quelques notes qui appuient ses choix tout en essayant de nous faire passer les implications de la langue. En effet, il s'agit bien d'un roman russe, dans lequel la langue russe est fondamentale. Mais on perçoit immédiatement la qualité de l'expression et le niveau recherché par l'auteur. D'une certaine manière, ça ralentit la lecture car on ressent le besoin de ne rien manquer. Par contre cette lecture lente est un réel plaisir.
L'histoire est aussi un prétexte pour aborder de nombreux sujets cruciaux de l'époque mais qui restent contemporains en enrichissant notre réflexion. Si le thème principal est le paricide, l'auteur réfléchit régulièrement sur la religion et l'athéisme qui se développait à l'époque (fin XIXè), dépeint la bourgeoisie russe de province (qui sera un des foyers des révolutions de 1905 et 1917), le fonctionnement de la justice par rapport au contrat social... Quelques textes sont de très grands morceaux de réflexion et m'ont profondément marqué : l'histoire du grand inquisiteur, le réquisitoire et la plaidoirie lors du procès...
Enfin, le déroulement du roman en lui-même le range dans la grande tradition romanesque russe. Les épisodes s'enchaînent de manière très précise et ont tous un rôle tant du point de vue de l'intrigue "policière" (car c'en est bien une finalement) que des thèmes abordés par Dostoievski.
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