Quelle bonne surprise que ce diptyque puisé au rayon BD d’une des annexes de la bibliothèque publique nîmoise ! Beaucoup de cases sans parole mais éloquentes par la palette déployée de couleurs aquarellées, fluides, nuancées, les physionomies réalistes et les expressions réussies des personnages. Une panne sèche dans la garrigue par 39° Celsius à l’ombre et le drame s’ourdit. Un touriste égaré se trouve exécuté sans aucun mobile apparent. Presque dix années passent et on retrouve Frantz le tueur à l’enterrement de son ami Rémi, décédé apparemment d’une crise cardiaque. Progressivement mais rapidement, tout se met en place, le quarteron d’amis raquetteurs que l’ancien gendarme Martial couvre ; les combines louches. Le lecteur peut croire que le laconisme de Martial dissimule mal une frustration rentrée mais l’histoire elliptique, faite de retour en arrière, humanise le personnage qui devient malgré lui enquêteur. En voulant récupérer une caisse de vin dans la maison de Rémi, son ami défunt, il met la main sur une enveloppe dissimulée qui contient des documents ayant appartenu à Jean-François Redon, le pseudo touriste liquidé au début du récit. Le flash back d’août 1978 en camaïeu rouge est une grande réussite de l’album. Martial, en s’interposant courageusement, évite à l’époque le viol de Jeannine.
Le suspense en fin de 1re partie est suffisamment tendu pour qu’on ait envie de se précipiter sur le second volet sans plus attendre.
Le scénario de Corbeyran est totalement maîtrisé car l’histoire se lit parfaitement malgré des ruptures temporelles presque incessantes. Le dessin réaliste, parfois un peu rigide et bancal dans la représentation des corps et des visages, est au diapason d’un récit où la folie rôde, où le vide affleure dans l’apparente banalité du quotidien. Les couleurs transparentes et lumineuses traduisent à merveille une atmosphère hautement inflammable.
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